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allons à la nôtre. » Sous ce rapport, un progrès notable s’est accompli pendant ces dernières années. Les sociétés d’émulation, des sciences, des lettres et des arts, d’agriculture même, ont toutes une section historique, et sur un grand nombre de points il s’est formé des associations spéciales au premier rang desquelles nous placerons la Société française pour ta conservation et la description des monumens historiques, fondée à Caen en 1830, par M. de Caumont ; la Société des antiquaires de Normandie, qui a publié à ses frais les rôles de l’échiquier de cette province, le pouillé de l’ancien diocèse de Lisieux, l’analyse des chartes et le dessin des sceaux conservés dans les archives du département du Calvados, l’académie de Besançon, à qui l’on doit trois volumes de documens inédits sur l’histoire de la Franche-Comté et la collection des papiers d’état du cardinal de Granvelle. L’académie de Reims s’occupe en ce moment d’une édition complète, des œuvres de Gerbert, d’une traduction de l’histoire de Flodoard, sera complétée par un fragment inédit de Richer, historien du Xe siècle, et, de plus, elle a édité l’Histoire de Reims de dom Marlot. A Rhodez, on travaille une biographie du département ; à Évreux, à la statistique générale de l’Eure. A Narbonne, la commission archéologique réunit, depuis plusieurs années, d’immenses matériaux pour composer une chronique narbonnaise ; la commission historique de la Gironde fait lever des plans et exécuter des dessins pour une statistique monumentale ; à Montpellier, on publie les registres municipaux les plus importans ; à Amiens, les coutumes du bailliage. Ces diverses publications, outre une incontestable valeur, se distinguent par l’exécution typographique ; elles renferment, ainsi que les mémoires, comptes-rendus ou bulletins, des dessins et des plans d’une exécution remarquable. En réunissant tous ces documens épars et trop peu connus hors des localités auxquelles ils ne se rattachent point directement, on arriverait, à peu de frais et sans grandes fatigues, à dresser pour l’ancienne France de curieux tableaux géographiques et statistiques, à réunir sur l’histoire du droit, sur la condition des personnes, les origines du christianisme, les traditions, les croyances, des documens qui formeraient une vaste synthèse, et, de plus, on rectifierait une foule de faits traditionnellement défigurés dans l’histoire générale. Ce n’est pas tout encore : les sociétés archéologiques et historiques ont, sur tous les points du royaume, encouragé par des concours les travaux d’érudition ; elles ont fondé des musées[1], elles ont fait mettre en ordre les archives départementales, elles ont sauvé de la destruction une foule de monumens précieux, et, en étendant sur les ruines un protectorat éclairé, elles ont resserré, pour ainsi dire, le lien qui unit l’avenir et le passé.

La liste des personnes savantes qui, sur tous les points du royaume, se sont ralliées au mouvement historique et en ont fécondé l’activité, serait fort longue à dresser : nous devons cependant une mention à celles qui ont le plus efficacement

  1. Parmi les collections les plus riches qui sont dues aux académies de la province, on distingue, soit pour l’archéologie, soit pour l’histoire naturelle, soit enfin pour les beaux-arts, les musées de Narbonne, de Rhodez, de La Rochelle, de Carcassonne, de Grenoble, du Puy, de Tours, de Metz de Langres, de Poitiers, de Lille, de Mulhouse, de Lyon, de Troyes et d’Orléans. Le musée de cette dernière ville a reçu depuis quelques années plus de 60,000 fr. de dons gratuits.