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cette conviction profonde : c’est que l’action lointaine d’un pouvoir central n’a jamais remplacé qu’imparfaitement l’action incessante d’un pouvoir immédiat ; c’est que l’autorité administrative, si habile, si dévouée qu’elle puisse être, ne saurait suppléer l’autorité militaire ; c’est que la puissance créatrice ne saurait résider que dans le chef de l’armée. Le jour où un gouvernement fort et prévoyant investirait ses agens d’un peu plus de confiance et de prestige, où il laisserait, si l’on peut s’exprimer ainsi, déteindre sa pourpre sur nos amiraux ; le jour où les commandans de nos escadres et de nos ports, ces grands-officiers de la couronne ministérielle, paraîtraient quelquefois distribuer de leurs propres mains le prix dû par l’état à de bons et loyaux services[1], ce jour-là, il se trouverait des chefs tout prêts à faire pour notre marine ce que Jervis et Nelson ont fait pour la marine anglaise. Ce jour-là aussi, nous nous plaisons à l’espérer, ou verrait, suivant le vœu du malheureux comte de Grasse, « renaître cette attache que les marins français avaient anciennement pour leurs chefs. »


E. JURIEN DE LA GRAVIÈRE.

  1. « Il faut que ce soit des amiraux que les officiers attendent leur avancement, écrivait Nelson au comte de Saint-Vincent ; sans cela, que leur importerait la bonne ou la mauvaise opinion de leurs chefs ? »