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LA DERNIÈRE GUERRE MARITIME.

supportait impatiemment ce qu’il appelait sa paresse (his idleness). Ce ne fut que deux jours après la conclusion de l’armistice et après avoir expédié en Angleterre le vaisseau danois le Holstein, le seul qu’il n’eût pas brûlé, avec le Monarch et l’Isis, sur lesquels il embarqua les blessés de l’escadre, que sir Hyde Parker songea à faire entrer sa flotte dans la Baltique ; mais, pour franchir les bancs qui s’étendent entre les îles d’Amack et de Saltholm, il fallut transporter l’artillerie de la plupart des vaisseaux à bord de navires de commerce, et encore, malgré cette précaution, plusieurs bâtimens touchèrent-ils plus d’une fois pendant ce périlleux passage. Enfin, après bien des peines, les Anglais, au grand étonnement des marins du Nord, pénétrèrent, le 12 avril, dans la Baltique par une route qu’on avait crue à jamais fermée aux grandes flottes de guerre. Avec 16 vaisseaux de ligne, sir Hyde Parker se porta immédiatement sur l’île de Bornholm, où il espérait surprendre l’escadre suédoise ; il était déjà trop tard : cette escadre, avertie des événemens de Copenhague, s’était réfugiée à Carlscrona. Parker l’y suivit ; mais il reçut, le 23 avril, une lettre du comte de Pahlen, qui lui annonçait la mort de Paul Ier et le désir de l’empereur Alexandre de voir renaître entre les deux cours les relations amicales un instant interrompues. Cette lettre le décida à suspendre ses opérations et à venir mouiller dans la magnifique baie de Kioge, située au-dessous de Copenhague. Il y trouva l’ordre de rentrer en Angleterre et de remettre à lord Nelson le commandement de la flotte.

L’attitude expectante qu’avait adoptée sir Hyde Parker en apprenant un événement devant lequel devait s’écrouler d’elle-même la confédération maritime des puissances du Nord ne pouvait convenir au bouillant amiral qui lui succédait. Embarquer les chaloupes et canots et se préparer à appareiller, tel fut le premier signal par lequel Nelson annonça à ses vaisseaux que le commandement de la flotte venait de passer en d’autres mains. Le 7 mai 1801, il quitta la baie de Kioge, et, se dirigeant sur Bornholm, il y mouilla pour attendre la fin d’un coup de vent. Là, il partagea son escadre en deux divisions, laissa les plus mauvais voiliers devant Bornholm pour y surveiller les mouvemens des 6 vaisseaux dont se composait l’escadre suédoise, et, avec 10 vaisseaux de 74,2 frégates et 1 brick, il fit voile pour le port de Revel. Il voulait y surprendre la flotte russe, et, la main sur ce gage important, exiger la levée immédiate du séquestre dont se trouvaient encore frappés les navires anglais arrêtés par les ordres de Paul Ier ; mais en même temps il prenait soin de rassurer l’empereur Alexandre sur ses intentions.

« Je suis heureux, écrivait-il au comte de Pahlen, de pouvoir donner à votre excellence la plus complète assurance de la nature pacifique et amicale des instructions que j’ai reçues à l’égard de la Russie. Veuillez exprimer à sa ma-