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somme moyenne sur laquelle ces viremens sont effectués. En 1845, le total de la somme a été de 9 milliards 143 millions, et le total de ce qui a été remis à la Banque en compte-courant par les particuliers, calculé d’après le milieu entre le maximum et le minimum, a été moyennement de 82 millions. Par conséquent, chaque franc est passé d’un compte à un autre cinquante-six fois dans l’année, ce qui suppose un transfert tous les sept jours. En 1844, l’intervalle avait été moindre encore, pas tout-à-fait de six jours. Ainsi, en moyenne, c’est pour une semaine tout au plus qu’aujourd’hui on livre à la Banque des capitaux en compte-courant. Cette circonstance ne contribue pas peu à limiter les ressources et par conséquent les opérations possibles de la Banque. Nous sommes ainsi conduits à cette règle : une banque centrale comme la Banque de France doit faire des efforts et se mettre en frais pour attirer à elle une plus forte part du capital en numéraire qui est à l’état de repos, ou qui cherche, sans l’avoir encore trouvé, un emploi définitif.

On voit ainsi comment le mécanisme d’une banque roule tout entier sur ce double pivot : le monnayage qui lui est attribué et l’usage adopté par les chefs de maison de lui verser en compte-courant leur argent disponible qui a une destination très prochaine ; mais, pour mieux éclairer la discussion de ce qu’a fait la Banque de France et de ce qu’elle aurait pu faire, quelques développemens de plus ne seront pas superflus. Étendons-nous donc davantage sur celle des attributions des banquess qui consiste à émettre des billets assimilés à la monnaie, protégés à ce titre par la loi d’une manière toute particulière. Pour parler nettement, c’est le droit de battre monnaie avec du papier qui leur est ainsi délégué, et c’est à la lettre que j’ai dans ce qui précède employé le terme de monnayage. Ce n’est donc rien moins qu’un des plus précieux attributs de la souveraineté publique dont elles sont investies, et elles y trouvent la source principale de leurs profits. Supposons qu’une banque avec un capital de 1 million ait en circulation 4 millions en billets ; les choses se passent comme si, au lieu de 1 million de capital effectif, elle en possédait4, ses profits sont quadruplés. La banque de Lyon qui, avec un capital de 2 millions, a une circulation de 12 ou 15 millions, fait ainsi de magnifiques bénéfices.

La circulation des billets ne profite pas moins au public. Une banque qui voit ses profits se proportionner à un capital triple ou quadruple de celui qu’ont fourni ses actionnaires, peut sans effort se contenter d’un taux d’escompte modeste. Si, pour une mise de fonds d’un million, le privilège de circulation dont vous a investi l’autorité vous met à même de toucher l’intérêt qui répond à quatre, à votre tour vous pouvez, vous devez être très facile sur le taux de l’intérêt. Au taux légal, votre million tout seul vous aurait rendu 5. A 3 pour 100, 4 millions, car les choses se passent exactement comme si vous les aviez, vous rapporteront 12. Retranchez 2 pour les frais d’administration, il reste un bénéfice