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suit le même, système[1]. Très probablement, si la Banque de France servait un intérêt de 2 à 2 et demi, ses billets à trois et, à six mois seraient adoptés par les capitalistes à cause de la confiance sans bornes qu’elle inspire. Il lui resterait de la marge pour avoir du profit, en admettant même qu’elle fît ce qu’il est impossible qu’elle ajourne longtemps, qu’elle abaissât à 3 le taux de son escompte, afin d’être au niveau des banquiers de Londres ; car tout tend à se niveler entre les deux pays, et, dans quelques mois, les communications seront devenues si faciles entre les deux capitales, l’une et l’autre centres de la richesse nationale, que les conditions du crédit commercial devront s’y égaliser.

On peut même dire que la banque d’Angleterre, par la vente des bons de l’Échiquier, fait une opération analogue à celle dont il s’agit ici. Qu’ils soient ou non émanés d’elle, ce n’en est pas moins une émission de titres de crédit portant intérêt, dont elle use pour attirer à elle une partie du capital flottant.

Par l’adoption de ces billets concurremment avec les billets à vue, la Banque se mettrait à la hauteur de son mandat ; elle deviendrait bien autrement qu’aujourd’hui ce qu’elle doit être, un grand centre pour le capital. Le numéraire métallique qui existe dans le pays peut être partagé en deux, d’un côté ce qui circule pour le règlement des transactions, de l’autre des fonds cherchant à se placer et s’accommodant d’un placement temporaire. Ces deux divisions de la richesse monnayée se mêlent, se confondent et se séparent sans cesse. On peut dire qu’elles présentent les capitaux monnayés, l’une à l’état de signe, l’autre à l’état de marchandise. Actuellement, par l’émission de ses billets à vue et par l’ouverture des comptes-courans, la Banque fait venir chez elle une fraction de cette seule division qui répond au signe ; ce sont les sacs de 1,000 et de 500 francs, qui, si la Banque n’était là, circuleraient péniblement de maison en maison pour le service des paiemens et des recettes. L’autre division, celle des capitaux monnayés à l’état de marchandise, lui échappe presque en entier, on l’a déjà vu. Désormais on verrait à la Banque tout le capital disponible qui recherche des placemens temporaires soumis aux moindres chances. Pourquoi donc la Banque croirait-elle que, pour alimenter le courant du crédit, il lui

  1. Voici comment les billets de la caisse Gouin se partageaient au 31 décembre 1845, époque à laquelle il n’y en avait que pour 29,772,000 francs :
    A 3 jours de vue, 9,739,000 fr. au taux de 2 et demi pour 100.
    A 15 «  3,966,000 «  3 pour 100.
    A 30 «  15,669,000 «  3 et demi pour 100.
    A 6 mois de date, «  205,000 «  3 et demi pour 100.
    A 1 an, 191,000 «  4 pour 100.
    A la même époque, la caisse Ganneron en avait pour 10,210,000 francs autrement distribués. Les billets à un an de date et à 4 d’intérêt s’élevaient à 2,341,000 francs.