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Cassis est le Carsici portus de l’itinéraire d’Antonin : c’était alors une colonie florissante ; on citait au loin ses temples, ses aqueducs, et c’est peut-être en méditant sur son passé que le plus illustre de ses enfans a été conduit aux études qui produisirent le Voyage du Jeune Anacharsis. Renversé au VIe siècle par les Lombards, au XIIIe par les Sarrasins, Cassis n’a pas toujours occupé sa place actuelle. Le golfe au fond duquel il est bâti contient des bancs de corail qu’exploitent ces mêmes pêcheurs génois dont les barques hardies stationnent chaque année sur nos côtes d’Afrique. Précédé d’un bon ancrage, le port de Cassis a 4 hectares d’étendue ; ses marins font un cabotage dont les principaux alimens sont l’excellent vin du voisinage et les matériaux à bâtir. Le vignoble est susceptible de prendre une extension qui serait suivie de celle du nombre des matelots qui en exportent les produits.

Le joli golfe auquel la Ciotat a donné son nom est séparé de celui de Cassis par le cap de l’Aigle, l’un des plus remarquables points de reconnaissance de la côte. La ville est assise au pied de riantes collines, à l’exposition du levant. Une haute et triste muraille l’enveloppe du côté de la terre ; reste de l’époque où les incursions des Lombards, des Sarrasins et des Normands désolaient ces rivages, elle est aujourd’hui réduite au prosaïque rôle de protectrice de l’octroi municipal. C’est dans cette enceinte que, rayonnantes de jeunesse, d’espérance et de beauté, les sœurs du jeune Bonaparte tressaillaient au bruit des victoires de l’armée d’Italie, et sans doute le temps des grandeurs passagères qu’elles pleurèrent dans l’exil ne valut pas ces jours de gloire et de pauvreté. La Ciotat est, dit-on, bâtie sur l’emplacement de l’antique Cytharistès. Il lui a toujours manqué, pour prendre rang parmi les grands ports de la Méditerranée, un territoire productif et des débouchés étendus du côté de la terre ; mais la navigation des Marseillais ne pouvait pas se développer sans recourir fréquemment aux avantages maritimes qu’a conservés cette position : ils y fondèrent une colonie 160 ans avant Jésus-Christ. Plus tard, les Romains y tinrent une de leurs stations navales. Plusieurs fois ravagée par les pirates du moyen-âge, la Ciotat se relevait rapidement aussitôt que l’Europe recouvrait quelque sécurité, et de 3,000 habitans qu’elle comptait en 1429, on la voit passer à 12,000 en 1530. L’établissement du régime des quarantaines et la révocation de l’édit de Nantes la réduisaient à 6,500 au commencement du XVIIIe siècle, et telle était encore sa population à l’époque où la révolution l’a fait déchoir encore. Elle tend aujourd’hui à se relever, et les recensemens officiels y ont constaté la présence de 5,237 habitans en 1820, et de 5,816 en 1841.

Le commerce est peu de chose à la Ciotat : l’année s’écoule quelquefois sans qu’il s’y fasse aucun échange direct avec l’étranger, et, restreint par le peu d’étendue des ressources locales, le cabotage excède