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La beauté régulière de la figure humaine est l’ordinaire indice du calme de l’ame, et cette tranquillité peut être aussi bien le partage d’une organisation médiocre qui est restée étrangère aux grandes agitations de la tête et du cœur, que d’une organisation supérieure qui a su les dompter. Dans l’un et l’autre cas, rien ne vient altérer la pureté des lignes, la limpidité du regard, rien, sinon l’inévitable et silencieuse action du temps. Si, au contraire, un tempérament plus riche que paisible associe, des passions vives à une intelligence prompte et forte, on verra se peindre sur le visage une tumultueuse abondance de sentimens et d’idées qui, sans détruire la noblesse primitive des traits, les éclaireront à chaque instant d’un jour nouveau. Telle est la physionomie de la France. Ses mœurs sont le reflet d’impressions ardentes, contradictoires, tantôt durables, tantôt éphémères : elles sont aussi la traduction dramatique d’idées qui se succèdent et souvent se détruisent avec une surprenante rapidité. Il y a des momens où ce qui ressemble le moins à la France qu’on croyait connaître, c’est la France.

Au milieu de cette mobilité, n’y a-t-il pas un esprit général qui persiste ? Il semble que nous ayons toujours en France obéi à deux penchans irrésistibles. Dans nos actions, dans nos mœurs, nous sommes raisonneurs, logiciens. Il faut que nos actes, notre manière de nous conduire et de vivre, soient à nos yeux une conséquence directe des idées que nous réputons les meilleures. Cette conviction, quand elle est vive, nous inspire le désir et c’est là l’autre trait permanent de notre caractère, d’imposer aux autres nos opinions et nos façons d’être. Nous sommes expansifs au plus haut point, et, à notre insu, notre humeur communicative a quelque chose d’impérieux, tant nous estimons naturel d’associer les autres à la vérité de nos pensées, à l’élévation de nos sentimens ! Pour arriver à ce but, nous dépensons de la franchise, de l’enjouement, de la verve, de l’éloquence, et nous excitons tantôt la sympathie, tantôt la contradiction. D’autres peuples vivent pour eux. L’Italien, l’Espagnol, suivent les suggestions de leurs désirs, les élans ; de leur imagination, sans avoir souci d’être approuvés ou imités. L’Anglais, dans sa fierté, n’a besoin que de sa propre estime. Nous, au contraire, nous cherchons constamment les regards d’autrui pour y lire une opinion sur notre compte. Nous n’avons pas assez de nous-mêmes, et le monde est au moins de moitié dans nos déterminations, nos actes, dans notre façon de juger et de sentir. C’est peut-être pousser trop loin la, sociabilité.

L’envie excessive de s’attirer des suffrages et des louanges, la crainte profonde de rencontrer le blâme, de soulever la désapprobation, sont à, la, fois pour notre caractère un mobile et un écueil, et nous précipitent dans deux extrêmes. Nous sommes fanfarons et hypocrites.

Il y a plusieurs manières d’être fanfaron. Le courage des Français