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de fer sulfuré, exige du sulfate de fer, substance fort commune en effet dans notre Europe, partout où les transports sont aisés. Il nécessite une consommation de combustible modérée assurément, eu égard à la pratique ordinaire de la métallurgie européenne, mais excessive pour l’industrie mexicaine ou péruvienne ; car, en ces pays où le minerai d’argent existe en profusion, le bois est une rareté. Une forêt y sera bientôt, si l’on n’y prend garde, une merveille qu’on viendra voir de loin. La méthode saxonne pour le traitement des minerais argentifères suppose aussi un certain avancement des arts mécaniques, la possibilité de construire et d’entretenir partout et à peu de frais certains appareils, et, dans la population, l’habitude de les manier. Or, sous le rapport de la mécanique, le Mexique et l’Amérique espagnole tout entière sont dans l’enfance. La brouette y est inconnue ; la charrette y est un objet de curiosité[1]. Par-delà ses dix doigts ; son couteau et son lazo, le Mexicain n’a guère d’outillage et ne se soucie pas d’en avoir. Enfin, pour mettre en mouvement des tonneaux, comme à Freiberg, dans la proportion qui correspond à une exploitation mexicaine, il faudrait avoir à bas prix une assez grande force motrice.

Vainement donc le procédé de Freiberg réussit-il à faire intervenir un métal commun, le fer, qu’on charge en disques dans les tonneaux, afin de détourner sur lui l’action corrosive, qui, dans l’amalgamation mexicaine, dissout une grande quantité de mercure, et de préserver ce dernier métal si précieux aux yeux du mineur américain. Vainement on réduit ainsi la déperdition du mercure à un dixième du poids de l’argent obtenu, c’est-à-dire au seizième de ce qui s’en consomme en Amérique[2]. Cet avantage, qui semble infini, disparaît complètement quand on tient compte et du combustible à consommer[3], et de la plus forte dose de sel qui est requise[4], et des autres circonstances particulières à la métallurgie du Nouveau-Monde. Ainsi le procédé remarquable de l’amalgamation dans des tonneaux animés d’un mouvement de rotation sur eux-mêmes, qui donne de si beaux résultats à Freiberg, et qu’on a reproché aux mineurs mexicains de ne pas avoir imité, ne pouvait s’introduire au Mexique. Il en restera banni tant que les conditions générales de l’industrie mexicaine n’auront pas

  1. Comme chez nous, au surplus, en Corse, avant qu’un gouvernement réparateur y eût commencé des routes, et cette amélioration ne date que de 1836.
  2. Dans le procédé saxon, le mercure n’apparaît que pour recueillir l’argent une fois qu’il a été séparé des substances avec lesquelles il était combiné. Dans le procédé mexicain, cette séparation est elle-même tout aux dépens du mercure. Les efforts qui ont été faits pour opérer la même diversion sur le fer dans l’amalgamation au patio, en mêlant du fer à la torta, ont été sans succès.
  3. Il faut, avec le procédé saxon, une quantité de bois égale au poids du minerai, afin de rôtir le minerai avant de le charger dans les tonneaux.
  4. Dix à douze pour cent du poids du minerai, au lieu de deux et demi à trois pour cent.