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réalité que l’auteur pourrait certainement leur donner, car ce n’est pas le savoir qui lui manque. Il est heureusement doué, et l’étude a développé ses facultés. S’il avait eu le courage de résister à ses premiers succès, s’il n’avait pas pris à la lettre les louanges qui lui ont été prodiguées, ses ouvrages compteraient parmi les meilleurs de notre temps. L’Accord et la Visite sont deux charmantes compositions très habilement traitées. Les chats surtout sont rendus avec une grande finesse.

Deux portraits de M. Cornu, celui du comte G. de B. et celui de Mme B., se distinguent par l’élégance et la solidité de l’exécution. Les deux têtes sont bien modelées. Il y a dans ces deux portraits un véritable savoir ; tous les détails sont traités avec un soin scrupuleux qui mérite d’être signalé. On voit que M. Cornu se contente difficilement, et il a raison. C’est à cette condition seulement qu’il est possible d’obtenir et de garder l’approbation des juges éclairés.

Les miniatures de Mme de Mirbel sont cette année, comme toujours, les plus belles miniatures du salon. L’élégance et la finesse des têtes ne laissent rien à désirer. Les portraits d’Ibrahim-Pacha, de M. His de Butenval, de M. le comte Pajol, prendront rang certainement parmi les meilleurs ouvrages de l’auteur. Ce qui assigne à Mme de Mirbel la première place, ce qui la recommande d’une façon toute spéciale, c’est la souplesse et la vérité des chairs. Elle lutte avec la peinture à l’huile, et parfois il lui arrive de soutenir dignement la comparaison. Elle possède, à mes yeux, un autre mérite non moins précieux : le succès ne l’a pas éblouie, la popularité ne l’a pas enivrée. Aujourd’hui, comme à l’époque de ses débuts, elle traite avec le même soin toutes les parties de son œuvre. Son zèle ne s’est point ralenti. Elle n’a vu dans la louange qu’un encouragement à mieux faire, et elle s’est efforcée, par des études persévérantes, de garder son rang. C’est un bonheur pour la critique de rencontrer un talent aussi éminent uni à une volonté aussi constante.

Les miniatures de Mme Herbelin, sans pouvoir se comparer à celles de Mme de Mirbel, offrent pourtant un intérêt sérieux. La Prière, étude d’après nature, révèle chez Mme Herbelin un savoir très positif, une connaissance approfondie des ressources de son art. La tête est d’une belle expression, le front pense, les yeux lisent bien. En un mot, l’auteur a su nettement ce qu’il voulait faire, et il a trouvé dans son pinceau un instrument obéissant. Toutefois Mme Herbelin doit se défier de sa prédilection pour la fermeté. Pour obtenir un contour pur et précis, il lui arrive de simplifier, au-delà de toute mesure, les plans du visage. Ainsi dans la Prière, depuis la pommette gauche jusqu’au menton, il n’y a qu’un seul plan, et la joue n’a pas la souplesse qu’elle devrait avoir. L’auteur dessine généralement bien ; il faut qu’il s’applique à mettre dans son travail un peu plus de variété. Les quatre portraits qui accompagnent la Prière donneraient lieu à des remarques du même genre.