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nastères. Le prince Bibesco vient d’obtenir le succès qui avait ainsi échappé à son prédécesseur ; il est juste de dire que le métropolitain de Bucharest lui a prêté tout son appui. Par le bienfait de cette loi, trente mille zingares passent à l’état d’hommes libres. Les revenus de la capitation que tous les affranchis doivent au trésor seront consacrés au rachat des esclaves des particuliers qui consentiront à vendre, car, on est forcé de l’avouer, les deux principautés contiennent encore environ cent mille esclaves, et il ne faudra pas moins de trente-cinq ans pour le rachat de ceux de la Valachie.

Le traité de la quadruple alliance va, par la force des choses, trouver une application dans les affaires du Portugal. Le bruit avait couru dans ces derniers jours que l’Angleterre s’était entendue avec le gouvernement espagnol pourrions évincer de la question portugaise, et pour travailler à résoudre sans nous les difficultés qui tiennent en échec le pouvoir de la reine dona Maria. Il n’en est rien. Si le ministère anglais avait en effet cherché à faire triompher un pareil dessein, la réponse de la France à une entreprise de cette nature eût été fort simple. La France se trouvait en droit de déclarer au gouvernement britannique que, dès que le traité de la quadruple alliance était méconnu dans ce qui concernait le Portugal, il n’existait plus pour ce qui regardait l’Espagne. Dès-lors la France était libre d’agir dans les affaires de la Péninsule d’une manière tout-à-fait isolée et de trancher seule les questions les plus délicates, comme par exemple celle de l’intervention dans un cas donné. L’Angleterre était loin d’avoir intérêt à pousser les choses jusque-là ; aussi n’a-t-elle rien fait de sérieux qui pût motiver de notre part une semblable attitude. Ce qu’il est permis d’augurer, c’est que l’anarchie du Portugal, à force de se prolonger, deviendra une sorte de question européenne, du moins pour la France, l’Angleterre et l’Espagne. On sentira le besoin de mettre la transaction qui devra enfin terminer la lutte entre la reine dona Maria et les insurgés sous la sanction de plusieurs puissances qui garantiraient au Portugal le rétablissement et la sincère exécution de la charte.

Quant à l’Espagne, nous parlerons sans découragement, mais avec franchise, du spectacle qu’elle nous présente. Il y a quelques semaines, après la chute de M. Isturiz, il s’était formé un nouveau cabinet sous la présidence du duc de Soto-Mayor. Nous n’avions pas une grande confiance en ce cabinet, où l’on remarquait trop l’absence des hommes les plus considérables du parti modéré ; il est incontestable cependant que ce ministère avait la confiance des chambres, qui le lui ont prouvé par un vote formel. Eh bien ! le cabinet de M. de Soto-Mayor a été destitué en masse le lendemain même ; la même chose était arrivée l’an dernier au ministère présidé par le marquis de Miraflorès. Il faut se méfier, en Espagne, des votes de confiance du parlement ; ils sont un fâcheux symptôme pour les cabinets qui les sollicitent et qui les obtiennent. Enfin il s’est formé un ministère qu’il est aussi difficile de qualifier que tous les autres. Est-ce un ministère modéré ? est-ce un ministère progressiste ? C’est là la grave question qui va s’agiter lorsque les chambres se rouvriront. Nous savons bien que le nouveau président du conseil, M. Pacheco, qui est un homme d’un esprit distingué, vise à former un nouveau parti en dehors des traditions des anciens partis, à se mettre sur un terrain neutre ; il veut être le chef d’un gouvernement conservateur progressiste. Aussi, d’un côté, s’est-il adjoint des hommes du parti modéré, tels que M. Benavidès, ancien chef politique de Madrid, et le