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frais du service, au contraire, peuvent varier suivant les lieux et presque selon les personnes. Mais, dans la dépense même, n’y a-t-il pas un élément fixe et qui ne change pas ?

M. Chégaray a établi que la dépense applicable à chaque lettre, dans les frais généraux d’administration, était de 8 centimes. Il a démontré en même temps que la proportion des frais de transport, frais qui varient naturellement en raison des distances, était de 1 centime trois quarts pour la lettre qui coûtait le moins, et de 6 centimes trois quarts pour la lettre qui coûtait le plus. En combinant les deux élémens de dépense, on trouve que la différence entre les lettres transportées à 40 kilomètres et les lettres transportées à 1,000 kilomètres est à peine de v centimes par lettre. Une différence aussi peu appréciable peut-elle légitimement servir de base à une graduation quelconque du tarif ? Il me paraît difficile de le soutenir. Je ferai du reste observer que la question a déjà été tranchée par les chambres. En supprimant le décime rural, qui représentait à peine le surcroît de frais déterminé par la distribution à domicile dans les campagnes, elles ont décidé par le fait qu’une différence dans les frais du service entre diverses localités, même jusqu’à concurrence de 10 ou 12 centimes, ne justifiait pas l’introduction d’une surtaxe dans le tarif.

En supposant que le tarif dût être gradué selon les distances, la surtaxe s’élèverait naturellement non pas d’un décime, mais d’un demi-centime à peu près par zone. Est-ce là l’échelle de prix que la poste observe ? « La lettre qui ne parcourt que 40 kilom., dit M. Chégaray, et qui coûte 9 centimes trois quarts, acquitte une taxe de 20 centimes ; elle paie par conséquent un impôt de 10 centimes un quart. La lettre qui parcourt la distance la plus longue, et pour laquelle on dépense 14 centimes trois quarts, paie une taxe de 1 franc 20 centimes, c’est-à-dire 1 franc 5 centimes trois quarts d’impôt, c’est-à-dire encore un impôt onze fois plus fort que la première. » Admettons que l’on restreigne à 50 centimes la limite extrême de la taxe des lettres, ainsi que l’administration des postes l’avait proposé, l’impôt à ce taux serait encore de 35 centimes un quart, c’est-à-dire à peu près trois fois et demie plus fort dans le dernier cas que dans le premier. M. de Girardin n’a-t-il pas raison d’invoquer contre le maintien du système actuel les promesses et les garanties données par la charte ?

Si faible que soit aujourd’hui la différence des frais de transport, elle tend encore à se réduire. En autorisant la concession des grandes lignes de chemins de fer, les chambres ont généralement stipulé que le service des malle-postes serait fait gratuitement ou moyennant une rétribution sans importance. Lorsque ces lignes seront en exploitation, le transport d’une lettre ne coûtera pas plus entre Paris et Lille, entre Lyon et Paris, qu’entre Paris et Versailles. Les frais variables deviendront