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jusque parmi ses amis les plus dévoués. Tout le monde en conviendra. Si, depuis plusieurs années, on n’avait jamais vu appeler à des fonctions considérables, parmi les membres de la chambre, que des hommes désignés par des services éminens rendus à la cause publique ou par des facultés spéciales reconnues de tous, nul ne se serait ému. Personne a-t-il jamais songé à trouver mauvais que les portes du conseil d’état se fussent ouvertes à MM. Vivien et Dufaure, et à bien d’autres qui, pour n’avoir pas occupé des ministères, n’étaient pas moins dignes de la préférence dont ils ont été l’objet ? Si tous les fonctionnaires qui siégent à la chambre n’avaient jamais reçu que des avancemens parfaitement réguliers, proportionnés aux services rendus dans leur carrière, aucune réclamation ne se serait élevée. Qu’on ne dise pas que les choix fâcheux ont été rares. Oui, cela est vrai et voilà le pire. On a compromis la position de beaucoup de fonctionnaires pour complaire à quelques-uns ; on a fait un grand mal pour de petites raisons. En fin de compte, le gouvernement n’a-t-il pas en main un moyen juste dans son principe, souverain dans ses effets, qui enlèverait à la proposition de M. de Rémusat tout ce qu’elle a d’utile et ne lui laisserait que le caractère d’un ostracisme parlementaire ? Pourquoi chacun des ministres, dans l’intérieur de son département, n’exigerait-il pas des fonctionnaires qui relèvent immédiatement de lui qu’ils fissent un choix entre leur siège à la chambre et les fonctions qu’ils remplissent ? Quel avantage le discernement judicieux du ministre n’aurait-il pas sur le texte brutal d’une loi ? Il n’y aurait pas là d’exclusions générales prononcées contre des catégories de fonctionnaires publics ; tous les motifs seraient pesés ; l’aptitude particulière des personnes, la nature spéciale des fonctions, seraient tour à tour prises en considération. Nous n’hésitons pas à le dire, si, par l’initiative des ministres et par un usage mesuré de l’autorité qui leur appartient, un petit nombre de fonctionnaires siégeant aujourd’hui à la chambre était tenu d’aller reprendre leurs fonctions en province ou leurs occupations dans les bureaux des ministères, la chambre ferait peut-être quelques pertes regrettables, l’administration n’en souffrirait pas, et une question difficile serait tranchée.

Passons aux réformes financières.

Quand, au moment des élections, les organes les plus considérables du cabinet avaient parlé hautement des progrès que la politique conservatrice pouvait seule réaliser, chacun avait compris qu’il s’agissait surtout de mesures populaires qui auraient pour but d’alléger une partie des charges qui pèsent sur les contribuables. Ne pas réaliser les espérances qu’ils avaient alors laissé concevoir et presque autorisées, c’était, pour les ministres, prendre une attitude incommode, dangereuse même, si elle ne leur eût été commune avec la majeure partie des membres