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avoir d’abusif dans son application à l’Algérie. Ainsi, la concession des mines, au lieu d’y être perpétuelle comme en France, n’est que temporaire et limitée à quatre-vingt-dix-neuf ans. La propriété concédée ne peut être vendue ni transmise d’une manière quelconque sans l’autorisation du gouvernement. Le but principal étant moins d’obtenir des minerais pour la métropole que de hâter le peuplement de la colonie, le concessionnaire n’est pas libre de restreindre ou de suspendre volontairement les, travaux ; on exige qu’il conserve à l’exploitation une activité proportionnée à son importance, et dont l’administration peut fixer la mesure. On donne à l’entrepreneur des facilités pour la main-d’œuvre en promettant d’accorder aux ouvriers qu’il réunira de petits lots de terre ; mais il faut qu’il règle sa production de manière à retenir sur les lieux une population suffisante. S’il stérilise par son inaction cette partie du domaine public qui lui a été confié, il s’expose à la déchéance. Les redevances diverses payées pour l’usage des tréfonds ne lui donnent aucun droit à l’exploitation de la surface ; l’état en reste le propriétaire, et il peut livrer à des concessionnaires ruraux les superficies propres à la culture. Il faut espérer enfin que les revenus du fisc seront prélevés exactement et non pas remplacés, comme en France, par des abonnemens dérisoires.

Malgré toutes ces restrictions, la propriété d’une mine offre encore une belle perspective aux spéculateurs, en Algérie surtout, ou des affleuremens de la plus magnifique apparence ont été signalés. Il n’est pas étonnant que les concessions de ce genre aient donné lieu à une poursuite des plus vives. L’affaire des mines algériennes ayant été déférée au tribunal de l’opinion, il devient nécessaire qu’elle soit connue dans tous ses détails, afin que le grand juge, le public, ne s’égare pas dans ses jugemens. Les faits méritent d’ailleurs d’être racontés, ne serait-ce qu’à titre de documens pour les historiens futurs de nos mœurs industrielles.

Pendant la campagne de 1840, une de nos colonnes, franchissant l’Atlas dans la direction d’Alger à Médéah, rencontra un énorme bloc métallique, une espèce de muraille d’environ trois mètres, en cuivre mêlé de fer. Ce furent donc nos soldats qui méritèrent le titre d’inventeurs, et, si l’on eût appliqué à la lettre la loi de 1810, une part dans les profits de la découverte eût dû leur être attribuée. On détacha du bloc de nombreux échantillons qui furent répandus en Algérie et en France. L’éveil fut ainsi donné aux spéculateurs. La richesse réelle d’une mine a moins pour mesure l’abondance de l’élément métallique que les charges et les difficultés du traitement industriel. Malgré la beauté des affleuremens, une exploitation à établir dans des montagnes sauvages, parmi des tribus à peine soumises, sans communications, sans ressources