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de Ferrare, la situation des États Romains est bonne en ce moment. L’Autriche elle-même s’est trouvée dans l’obligation de reconnaître d’une manière explicite l’indépendance du gouvernement pontifical, et la réponse qu’ont faite à sa note les cabinets de Paris, de Londres, de Berlin et de Saint-Pétersbourg, est une nouvelle confirmation d’un principe qui se trouve ainsi proclamé à l’unanimité. Si cependant des éventualités qui, nous le disons avec joie, paraissent aujourd’hui peu vraisemblables, amenaient, pour la troisième fois depuis dix-sept ans, les Autrichiens dans les États Romains, il est permis d’affirmer qu’ils n’y entreraient pas seuls. L’intervention de la France deviendrait alors pour Pie IX une garantie que, nous n’en doutons pas, il serait le premier à réclamer. Dans tous les cas, la France n’aurait à prendre conseil que d’elle-même ; mais, nous le répétons, jusqu’à présent tout autorise l’espérance que le gouvernement de Pie IX suffira, sans intervention étrangère, à sa tâche glorieuse, et que les réformes obtenues par les populations italiennes, tout en consolidant leur liberté, seront aussi la sauvegarde de leur indépendance.

De toutes ces réformes, l’organisation de la garde nationale est sans contredit celle dont les excellens effets se feront le plus généralement sentir. L’ordre et la tranquillité qui règnent dans Rome depuis que les citoyens se gardent eux-mêmes et font la police de la ville en sont une preuve manifeste. Les meurtres et les vols, autrefois si fréquens, ont diminué dans une proportion sensible, et qui sera constatée par de curieuses statistiques dont on prépare la publication. Voilà des résultats dont la diplomatie a pu se convaincre, et qui nous semblent propres à rassurer les esprits sur les conséquences que peut avoir cette institution appliquée aux autres états de l’Italie. Nous pensons que le grand-duc Léopold n’aura pas à se repentir d’avoir mis la force publique entre les mains de son peuple, car, si la bourgeoisie armée est la gardienne des libertés civiles, elle est encore le plus sûr rempart du pouvoir contre les minorités factieuses.

Depuis un an, la Toscane s’applique à suivre pas à pas la marche du gouvernement pontifical. Là aussi, par esprit d’imitation et peut-être sans se rendre bien compte de l’importance d’une telle concession, on demandait la garde nationale. Des pétitions étaient signées à Florence, à Pise, à Livourne, à Sienne, jusque dans les moindres bourgs, et, le gouvernement ne cédant pas assez promptement au gré des pétitionnaires, Florence a voulu à son tour avoir sa démonstration populaire, démonstration assez inoffensive, si on la considère en elle-même, et telle qu’il convenait à la douceur du caractère toscan, mais que la prudence conseillait d’éviter dans les circonstances présentes. Le lendemain, la Patria, le journal le plus sérieux et le plus accrédité de Florence, faisait parfaitement ressortir l’inutilité et l’inopportunité de ce mouvement. Cette feuille reconnaissait la nécessité où se trouvent les états de l’Italie de ne fournir aucun prétexte à leurs ennemis, de tels actes servant de motif aux uns pour combattre les idées de réforme, aux autres pour s’abstenir de les encourager et justifier leur inaction ; mais les sages avis ont toujours le tort de n’arriver qu’après coup. S’il faut aux habitans de la Toscane des modèles, les villes de la Romagne peuvent leur donner de fort bonnes leçons de conduite politique. Dans cette partie de l’Italie, où les formes constitutionnelles ne sont point tout-à-fait une nouveauté, sous le coup des menaces de l’Autriche et dans les appréhensions d’une invasion imminente, nous voyons le peuple formuler ses vœux en