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publique est né de l’étouffante obscurité du régime actuel ; donnez au malade le jour, la publicité, la vie de la tribune, faites-lui enfin sa part, cette part si bien gagnée et si patiemment attendue ; alors il se lèvera, et les songes de la fièvre s’évanouiront sans laisser de trace. Quoi ! c’est dans une telle situation que l’on conteste au parlement de Berlin ses droits les plus sacrés ! c’est maintenant qu’on veut perpétuer l’esprit féodal, immobiliser les castes et donner à de petites catégories les représentans qu’on enlève à la nation ! Ces défenseurs obstinés d’un passé impossible ne savent pas de quelle responsabilité ils se chargent. S’ils comprennent toute leur mission, s’ils veulent bien mériter de la patrie et de la société européenne, ils ne pousseront pas à bout des intelligences égarées. Pour moi, je voudrais que ces pages parvinssent au brillant et bienveillant monarque sur qui l’Europe a les yeux attachés ; il me semble que ce tableau des désordres de la pensée chez une jeunesse d’élite serait la plus pressante des pétitions. Hâtez-vous, lui dirais-je ; sauvez l’Allemagne, sauvez le génie spiritualiste, sauvez ces malheureux jeunes gens ! Chaque heure de retard voit éclore peut-être un de ces systèmes qui déshonorent la pensée germanique. Toute cette vie qui abonde dans les générations nouvelles, toute cette ferveur enthousiaste, ne voyez-vous pas qu’elle se perd en orgies, en délires sans nom ? Donnez le remède, ô vous qui l’avez ; donnez la liberté et la lumière, pour que l’Allemagne un jour, en versant des larmes, ne vous redemande pas ses légions !


SAINT-RENE TAILLANDIER.