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de l’originalité lorraine, c’est un musée spécialement ouvert aux monumens si nombreux et si divers du génie austrasien. Dans ce musée à la fois bibliothèque et galerie, on trouverait les chefs-d’œuvre de Callot, de Claude Lorrain, de Richier et d’Adam à côté des armures des chevaliers, les tapisseries de la tente du Téméraire à côté des drapeaux enlevés aux musulmans. Toutes les collections de livres et de manuscrits relatifs à l’histoire de la province, aujourd’hui dispersées ou enfouies, seraient là réunies dans un seul groupe, dans un ensemble harmonieux. Une telle idée pourrait, ce nous semble, être heureusement appliquée à la plupart des musées de la province, dont l’organisation actuelle laisse tant à désirer. Le culte des antiquités provinciales, après avoir traversé sur les divers points de la France une période d’engouement puéril, atteindrait ainsi sa période d’organisation et d’activité régulière. Des livres comme celui de M. de Dumast doivent être à ce propos signalés comme d’heureux symptômes. Si de pareils travaux se multipliaient, ce ne serait pas seulement l’histoire de telle ou telle province, mais l’histoire même du pays, qui en profiterait.


KOPERNIK ET SES TRAVAUX, par M. Jean Czynski[1]. — Jusqu’à présent le nom de Kopernik n’a guère rappelé à l’imagination que l’homme de génie qui, réformant le système du monde adopté par les anciens, jeta les premières bases des travaux astronomiques de Galilée, de Kepler, de Descartes et de Newton. C’était déjà une assez belle gloire pour le savant polonais d’avoir été le précurseur de ces éminens fondateurs de la science moderne ; mais cette illustration n’a point paru suffisante à l’un des compatriotes du chanoine de Warmie. M. J. Czynski s’est imposé spontanément, — comme il le dit lui-même à la fin de son ouvrage, — la tâche de prouver combien Kopernik a influé par ses découvertes sur le mouvement intellectuel et moral de la civilisation. Pour lui, Kopernik est avant tout un socialiste antérieur de trois siècles[2] à Saint-Simon et à Charles Fourier, un réformateur méconnu dont les découvertes sidérales ont préparé de longue main les doctrines humanitaires que ces hardis novateurs se sont efforcés de propager. « L’astronomie, s’il faut en croire l’auteur de Kopernik et ses travaux, ne serait qu’un amusement frivole, si la découverte des harmonies célestes et du code sidéral ne devait pas trouver une application aux relations sociales, aux lois qui doivent gouverner les hommes et les états » Non-seulement nous ne partageons pas cette opinion, mais nous regrettons vivement de voir qualifier d’amusement frivole la science qui sert de base à la géographie et à la navigation, ce puissant moyen de communication sans lequel à coup sûr toutes les doctrines humanitaires, rêvées par les adeptes du socialisme, ne sauraient s’étendre d’un hémisphère à l’autre. Quoi qu’il en soit, si le système de M. Czynski donne prise aux objections, il a du moins le mérite de la singularité. Selon lui, Nicolas Kopernik fut conduit par une piété ardente et sincère à la contemplation

  1. Un vol. in-8o, chez Jules Renouard.
  2. L’ouvrage de Kopernik, intitulé de Revolutionibus orbium coelestium, ne parut qu’en 1543, peu de jours avant la mort de l’auteur ; mais il était complètement achevé depuis plus de treize ans, lorsque celui-ci se décida enfin à le faire imprimer à Nuremberg, avec une dédicace adressée au pape Paul III.