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propagandiste, c’est ce que ne doivent pas oublier les Italiens quand ils se sentent disposés à se plaindre de nous. La diplomatie de lord Palmerston aura, nous n’en doutons pas, un ton plus bruyant ; mais soutiendra-t-elle ce qu’elle aura excité ? Que l’Italie se demande si elle croit lord Palmerston bien décidé à se brouiller sérieusement avec l’Autriche en sa faveur. Si elle nous juge avec sévérité, qu’au moins elle ne soit pas dupe des séductions dont en ce moment l’environne l’Angleterre.

Du reste, entre Rome et l’Autriche, la question de Ferrare est en voie d’arrangement, et tout sera rétabli sur l’ancien pied. On ne saurait disconvenir que dans cette circonstance, si la cour de Vienne retire effectivement ses troupes des positions nouvelles qu’elle avait prises dans la ville de Ferrare, elle fait preuve d’une louable modération. Cet acte et d’autres symptômes montrent que l’Autriche ne méconnaît pas les changemens qui se sont opérés depuis plus de vingt ans tant en Italie que dans le reste de l’Europe. Nous ne sommes plus au temps où la sainte-alliance établissait la solidarité des gouvernemens contre les peuples, où des congrès comme ceux de Laybach et de Vérone donnaient à cette politique peu libérale une consécration solennelle. Aujourd’hui un autre principe tend à prévaloir : c’est celui de l’indépendance des souverainetés et des peuples. C’est sous l’égide de ce principe que Pie IX accomplira, nous l’espérons, son œuvre de sage réforme, qui sera pour toute la péninsule un exemple, un encouragement à conquérir pacifiquement des résultats durables, parce qu’ils ont pour base la double volonté des peuples et des gouvernemens. Sur tous les points des états du saint-siège, l’ordre est respecté et le pouvoir obéi. Une légère émotion qui, dans ces derniers temps, s’était manifestée à Bologne, a été réprimée par le bon sens et la sagesse de la population.

La question du moment en Toscane, c’est la création de la garde nationale. Un vif mécontentement a accueilli la loi qui l’institue. On s’est plaint des restrictions multipliées et des réserves introduites par le gouvernement, qui sembleraient l’indice d’une défiance injurieuse pour la population. Cette loi présente en effet des ambiguïtés dont pourrait tirer parti une administration malintentionnée. Il est du devoir du gouvernement de lui donner dans la pratique une interprétation plus large ; le temps et l’habitude devront aussi modifier et corriger les parties défectueuses. En Toscane comme à Rome, dans des états où la liberté est de si fraîche date, les tâtonnemens, les hésitations, sont inévitables. L’important est de n’avoir point à douter des dispositions du chef de l’état et d’être assuré que ses intentions loyales ne seront point faussées dans l’application, comme on l’a vu à Rome au temps de MM. Santucci, Grassellini. L’opinion à Florence n’est pas très favorable, sous ce rapport, aux ministres actuels. On accuse M. Paver d’être ennemi du progrès, M. Baldasseroni de se ménager adroitement entre les deux camps. Au lieu de prendre d’une part l’initiative des réformes et de réprimer en même temps les tentatives qui pouvaient compromettre la liberté d’action du gouvernement, ces deux ministres ont résisté jusqu’au bout, puis ils ont composé avec le mouvement. Alors, soit calcul, soit faiblesse, ils ont affecté de se décharger de la responsabilité des concessions qu’ils faisaient si tardivement, et, le jour même où ils créaient la consulte d’état, ils ont remis à sa décision l’institution de la garde nationale. La consulte renferme dans son sein des hommes d’une capacité et d’un patriotisme éprouvés, tels que MM. Ridolfi, Capponi. Il était habile de s’abriter derrière ces noms