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nous verrons bien qu’elle n’en devait sortir qu’à la dernière extrémité. Le parti de la ville natale se fit aussitôt le champion des sages de l’administration prussienne, et il nomma une commission pour examiner sur quel fondement on pourrait organiser l’alliance commerciale de l’Allemagne.

Dans un rapport publié cette année seulement, après deux ans d’étude, la commission et le parti tout entier réclament énergiquement l’introduction d’un système de droits différentiels. Il leur faut un privilège exclusif pour le pavillon allemand dans le cabotage allemand, un droit spécial sur tout pavillon étranger entrant dans un port allemand. L’unité maritime de l’Allemagne leur apparaît tout ensemble comme la conquête d’un grand bien-être matériel, comme un grand triomphe moral et politique. Brême n’a pas manqué de donner la main à ces auxiliaires qui se levaient en sa faveur au sein de sa rivale. La Gazette du Weser les a soutenus contre le Correspondant de Hambourg, et cette petite guerre n’a pas cessé[1].

Les droits différentiels allaient avoir encore cette année même de plus illustres avocats, des patrons plus autorisés ; ils allaient être l’objet des vives préoccupations du parlement prussien. Un député de la Ritterschaft poméranienne, M. de Heyden-Cartelow, homme d’un esprit sérieux et appliqué, mit en avant tout un régime nouveau dont ces droits formaient la base. Dans la curie des seigneurs, le prince Lychnowski demanda, par une pétition en règle, qu’on révisât derechef les tarifs du Zollverein, déjà réformés pourtant à la date du 28 octobre 1846, après la conférence douanière de Berlin. Il soutenait hautement que l’un des élémens essentiels de cette révision devait être l’introduction des droits différentiels dans tous les rapports maritimes et commerciaux de l’Allemagne. Le jeune seigneur silésien, grand chercheur de bruit et de popularité, n’avait pas toujours trouvé d’aussi bonne occasion que celle-là pour paraître à son avantage. Les débats s’engagèrent le 17 mai et tinrent une séance très bien remplie. Votant sur le rapport de sa commission, la chambre renvoya la pétition au gouvernement comme digne de toute sa sollicitude. La plupart des orateurs défendirent chaudement la cause des droits différentiels ; ceux même qui se déclarèrent libres échangistes, tels que le comte Dyhrn, gardèrent une réserve expressive sur la question spéciale des faveurs à faire au transit direct ; le prince Frédéric, le prince Adalbert, le prince

  1. Un livre récemment publié à Hambourg même se prononce encore dans le même sens : La côte d’Allemagne et le pays de l’intérieur. — Die deutsche Küste und das Binnenland, par M. OEhlrich. — Tous ces publicistes de la Hanse professent à l’endroit du Zollverein tel qu’il est à présent une souveraine répulsion ; mais ils s’accordent à soutenir un plan d’unité plus compréhensive qui reposerait sur l’application des droits différentiels.