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cette population, on y trouverait de très puissantes considérations hygiéniques et morales à l’appui des règlemens, trop souvent enfreints, qui limitent à Paris la hauteur à donner aux maisons. Pour bien apprécier l’état des quartiers où la population est ainsi pressée, il faudrait d’abord y déterminer la proportion de la mortalité ; mais leur contingent dans la mortalité des différens hôpitaux est si considérable, que cette recherche n’atteindrait pas, sans un assez long travail, un degré satisfaisant d’exactitude. La densité de la population est à Londres de 106 habitans, à Liverpool de 389 par hectare. Dans les quartiers les plus peuplés de ces deux villes, la densité est, pour la première, de 938 individus, pour la seconde de 1776 : ces quartiers sont ceux où la misère est la plus grande et la mortalité la plus forte.

La population de Paris s’accroît beaucoup plus rapidement que celle du reste de la France. Du recensement de 1831 à celui de 4846, l’une a passé de 774, 338 ames à 1, 053, 897, l’autre de 31, 726, 596 à 34, 346, 611. Ainsi, lorsque, dans cette période de quinze années, Paris gagnait 348 habitans par 1, 000, le progrès n’était au dehors que de 82. La supériorité habituelle du nombre des naissances sur celui des décès n’entre que pour une faible proportion dans cette augmentation de la population de Paris ; elle est surtout due aux immigrations des provinces et même de l’étranger.


Entre les deux derniers recensemens, l’accroissement total a été de 118, 536 ames
Pendant les cinq années 1842, 1843, 1844, 1845 et 1846 qui se sont écoulées entre ces deux recensemens, on a compté
Naissances 150, 067
Décès 137, 270
La différence à l’avantage des naissances étant de 12, 797
Il reste pour la part de l’immigration 105, 739 ames

Aucune ville n’appartient moins que Paris à ses indigènes ; elle appelle incessamment à elle tout ce que les provinces renferment d’éminent, d’habile, d’aventureux ; sa fortune est le patrimoine de tout le monde, et la plupart des positions élevées y semblent dévolues, par la nature des choses, à des hommes étrangers à la cité. On remarquait, à la Commission municipale qui fut portée à l’Hôtel-de-Ville par les journées de 1830, qu’elle ne comprenait pas un seul Parisien de naissance. Il en a presque toujours été à peu près de même depuis 1789 ; ce sont rarement des Parisiens qui ont exercé une influence prépondérante sur les destinées de Paris ; les habitans des provinces sont aujourd’hui plus que jamais appelés à recueillir les avantages qui naissent dans ce centre commun, et il est bon de le leur répéter quelquefois pour modérer le sentiment de jalousie que peut exciter en eux la prospérité de la capitale.