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dévoués de don Henri et déserteurs des drapeaux du roi ; enfin Alvar Perez de Guzman, mari de doña Aldonza Coronel, et Garci Laso Carrillo, mari d’un autre maîtresse de don Pèdre, Maria de Hinestrosa. Par une faveur spéciale, ces deux derniers devaient recouvrer la jouissance de leurs biens confisqués, à l’exception pourtant de leurs forteresses, dévolues au domaine royal. Un délai de six semaines fut fixé pour la restitution des biens séquestrés sur les émigrés compris dans l’amnistie ; l’inexécution de cette clause devait entraîner l’interdit sur le diocèse où ces biens étaient situés, et l’excommunication de tout le royaume, si leur valeur dépassait cent mille maravédis.

On remarquera que don Tello et don Sanche, frères du roi, bien qu’ils eussent accompagné don Henri dans son incursion en Castille, sont admis à jouir du bénéfice de l’amnistie. Le premier cependant est déclaré déchu de ses prétentions sur la seigneurie de Biscaïe et les autres domaines de sa femme, doña Juana de Lara.

L’asile que le roi d’Aragon accordait aux onze personnages exceptés de l’amnistie était considéré comme une disposition temporaire ; car les deux rois s’engagèrent pour l’avenir à ne recevoir dans leurs états aucun vassal rebelle. C’était renouveler la convention d’Atienza, si mal observée, comme on l’a pu voir.

Arbitre et signataire du traité, le légat prononça l’annulation des sentences rendues précédemment par don Pèdre contre les proscrits, maintenant amnistiés, et en même temps la révocation de celle que le cardinal Guillaume avait portée contre le roi de Castille. Cette dernière sentence, on le sait, excommuniait don Pèdre et mettait son royaume en interdit. A la formule assez vague employée par le cardinal Gui de Boulogne, au soin qu’il prend de rapprocher et de confondre en quelque sorte la sentence de son prédécesseur et l’arrêt du roi de Castille, enfin à l’affectation qu’il met à éviter les termes formels d’interdit et d’excommunication, il semblerait que le saint-siège n’eût pas approuvé le jugement du légat Guillaume, ou qu’il éprouvât quelque honte à rappeler l’usage impuissant qu’il avait fait de ses armes spirituelles. Cependant les mots d’excommunication et d’interdit reparaissent dans les clauses pénales, et le légat a soin d’ajouter que seul il aura le pouvoir de réconcilier avec l’église le prince qui se serait rendu coupable d’une infraction au présent traité. A la peine religieuse, il eut soin d’ajouter une amende de cent mille marcs d’or, dont moitié pour le trésor apostolique et moitié pour la partie fidèle à ses engagemens.

Les deux rois prêtèrent serment entre les mains du légat d’observer fidèlement les conventions précédentes. Avec eux, plusieurs riches-hommes et quelques communes, représentées par leurs procurateurs, répétèrent le serment, s’en rendirent cautions et apposèrent leur sceau sur les copies échangées par les chancelleries castillanne et aragonaise.