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II

Nous venons de voir ce qui se passe dans la rencontre de deux ou de plusieurs variétés de la nature humaine faites pour s’unir : il y a d’autres cas où des familles mises en présence répugnent au mélange ; dans cette circonstance exceptionnelle, les races inférieures fléchissent sous les races supérieures, mais elles ne se croisent point avec elles. On les voit alors perpétuer dans leur isolement les caractères d’une origine suspecte. Pourquoi maintenant le principe central et civilisateur agit-il diversement sur les races ? Cela vient de leur constitution physique plus ou moins stationnaire. La nature oppose dans les familles humaines, comme dans les enfans, des obstacles de plus d’un genre à l’éducation morale. De là l’importance extrême de la physiologie : elle seule, en effet, nous dévoile les caractères organiques par lesquels certains groupes résistent au mélange et au développement des sociétés.

On a voulu chercher dans les préjugés religieux l’origine de l’anathème qui pèse sur certaines races. Il ne faut point nier l’importance de cette cause, mais il ne faut pas non plus l’étendre à toutes les familles réprouvées. Les croyances religieuses sont intervenues, sans contredit, dans cette réprobation ; on peut surtout leur attribuer les persécutions exercées contre les Juifs au moyen-âge. La mort de l’homme-Dieu était toujours présente et se montrait en quelque sorte aux peuples chrétiens par la figure si aisément reconnaissable du peuple israélite. Il existe, en outre, des motifs politiques auxquels on doit rapporter la haine du moyen-âge contre cette nation dispersée. Dans un temps où le commerce était abandonné, les Juifs, race usurière et mercantile, trouvaient toujours le moyen de soutirer à eux les richesses de la nation sur le territoire de laquelle ils s’étaient établis. Chassés, ils emportaient avec eux encore une fois les trésors d’Égypte ; dépouillés, ils découvraient dans leur inépuisable industrie le secret de relever leur fortune. Toutes ces causes morales ne sont néanmoins qu’accessoires les questions de races dominent, surtout dans les commencemens, les rapports de nation à nation, d’homme à homme. Il est facile de s’en convaincre en faisant l’application de nos principes aux cagots, ces parias du midi de la France.

Un docteur allemand, M. Kant, auteur de mémoires curieux sur la constitution physiologique des peuples, fut amené il y a quelques années, par l’ordre de ses études, à visiter les populations du midi de la France enclavées dans l’ancienne Novempopulanie. Il fut surpris de découvrir dans quelques familles du pays les débris physiologiques d’une grande race qui devait avoir existé sur une étendue assez considérable du territoire. Le nom de cagots, qui avait cessé d’être