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qu’on lui rappelle ces règles invariables du crédit ; elle ne les avait pas assez présentes à la mémoire, lorsqu’elle fixa le taux de consolidation des caisses d’épargne et des bons du trésor. Cédant à des conseils pervers, elle a rendu bien des créanciers de l’état victimes de leur bonne foi ; puisse-t-elle ne pas sentir un jour la juste défiance de ceux qui furent ainsi sacrifiés ! Indépendamment des circonstances politiques que personne ne saurait prévoir, en dehors des complications possibles de nos relations extérieures, le succès de nos finances dépend beaucoup des principes qui serviront de base aux décrets financiers de l’assemblée. Malheur à nous, si, sous des noms plus ou moins déguisés, le communisme, le socialisme ou ce qu’on appelle les doctrines humanitaires fait invasion dans nos lois de finances !

L’avenir, il faut le répéter souvent, est très sombre, très difficile ; M. Goudchaux, avec une louable franchise, ne fa pas caché au pays ; cette franchise même commande la confiance, et l’on doit croire à la vérité, à la sincérité de ses estimations, autant du moins que dans les circonstances actuelles on peut préjuger l’avenir de nos impôts. Après les administrations de M. Garnier-Pagès et de M. Duclerc, qui avaient adopté le malheureux système de dissimuler le triste état de nos finances, on se voit avec satisfaction entre les mains d’une administration qui cherche à éclairer et non pas à égarer l’opinion publique. M. Goudchaux a déjà senti les avantages de cette nouvelle politique, seule digne d’un esprit honnête vis-à-vis d’un peuple libre. Nos vœux les plus fervens sont pour le maintien de la paix ; espérons que la France échappera aux dépenses sans fin qu’entraînerait une guerre en Italie, d’où sortirait peut-être une guerre générale. On assure que tels sont les désirs du gouvernement, et nous avons assez de confiance dans la sagesse, dans la sagacité du général Cavaignac, pour n’en être pas surpris. Sans doute l’opinion de l’immense majorité de l’assemblée et de la presque unanimité du pays encouragera le gouvernement dans cette ligne de conduite, qui sauvera la république de bien des dangers. À cette condition, on peut jeter avec quelque confiance les yeux sur notre avenir financier. L’administration aura certainement à soutenir encore bien des luttes contre la fâcheuse tendance de beaucoup d’esprits, moins sages qu’avides de popularité, qui voudraient immédiatement faire main basse sur presque tous les impôts de consommation. Le comité des finances aidera puissamment le ministre dans cette lutte ingrate, mais si nécessaire. Que la représentation nationale ait constamment sous les yeux ces sages paroles de M. Goudchaux : « La France républicaine ne peut supporter ses charges financières qu’en apportant la plus sévère économie dans son administration et la réserve la plus rigoureuse dans le vote des lois qui tendraient à accroître les dépenses. » L’assemblée nationale devra se rappeler sans cesse que la