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révolution a déjà augmenté la dette publique de 40 millions de rente ; que le budget de 1848 présentait un déficit de plus de 210 millions, comblé, il est vrai, par les dernières mesures financières dont le succès ne sera assuré que si la paix est maintenue ; qu’enfin le trésor aura bientôt 230 millions à rembourser à la Banque de France, et, tant que ces 230 millions ne seront pas remboursés, la Banque sera obligée de marcher dans la voie périlleuse du papier non convertible. Si le bon sens du pays et la confiance qu’inspire si justement l’administration de la Banque conservent au billet sa valeur entière, que le gouvernement se garde bien de s’autoriser d’un tel symptôme pour augmenter la circulation du papier. Le gouvernement, depuis quatre mois, a puisé d’immenses ressources dans le crédit de la Banque ; la Banque seule a sauvé le trésor d’une honteuse banqueroute. Au mois de mars, M. Garnier-Pagès força la Banque de lui avancer 50 millions, sans garantie alors que la signature de l’état se négociait à 50 pour 100 de perte, sans intérêts alors que les fonds publics donnaient 40 pour cent d’intérêt. La Banque, avec un patriotisme qu’on ne saurait trop louer, souscrivit à toutes ces conditions et préserva par son crédit l’honneur du trésor. Plus tard, elle avança contre transfert de rentes 30 millions à la caisse des dépôts et consignations. C’étaient déjà 80 millions, plus que le montant même de son capital, que la Banque prêtait à l’état. Au mois de juin, M. Duclerc demanda à la Banque de lui fournir le moyen d’exécuter son système financier, en avançant encore 150 millions qui lui devenaient nécessaires pour exproprier et payer les compagnies de chemins de fer. Nous n’examinerons pas les motifs qui ont déterminé le conseil de régence à donner son concours à M. Duclerc et à lui faciliter l’exécution d’un plan dont le premier acte était la mesure si odieuse de l’expropriation des chemins de fer ; de puissantes raisons que nous ne sommes pas à même d’apprécier ont décidé la Banque à faire au trésor un prêt de 450 millions payables, 75 millions en 1848 et 75 millions en 1849, contre garantie suffisante en rentes et en forêts de l’état ; ce prêt remboursable en 1850. En comprenant ce nouvel emprunt, la dette totale de l’état vis-à-vis de la Banque s’élève aujourd’hui à 230 millions, soit trois fois le capital de la Banque. Quelques esprits regrettèrent que la Banque, si intéressée au maintien de l’ordre et des saines doctrines dans l’administration de nos finances, ait donné dans cette occasion un puissant appui au ministre dont l’opinion publique faisait déjà justice, et dont la chute prochaine était inévitable. Ils se demandèrent pour quelle nécessité on engageait six mois à l’avance les ressources de la Banque, puisque la moitié de l’emprunt n’était payable qu’en 1849 ; pourquoi la Banque ne se bornait pas à accorder les 75 millions dont le trésor avait besoin dans l’année courante. Le budget rectifié de 1848 et l’exposé des mesures financières de M. Duclerc, par le