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Le plus gros diamant connu est celui du raja de Matan, dans l’île de Bornéo. Il est de la plus belle eau, et pèse, dit-on, 367 carats (73,4 grammes environ). Ce diamant a dans l’Inde une grande célébrité, et est regardé comme un talisman auquel est attachée la fortune du raja et celle de sa famille. Aussi ces princes n’ont-ils jamais voulu s’en dessaisir malgré les offres séduisantes de quelques spéculateurs hollandais. Celui de l’empereur du Mogol était du poids de 279 carats (55,8 grammes). Tavernier l’a estimé 11 725 000 francs. Celui de l’empereur de Russie pèse 193 carats (38,6 grammes). Quoique d’une mauvaise forme, il a été acheté 2 160 000 francs, plus 90 000 francs de pension viagère. Le diamant de l’empereur d’Autriche pèse 139 carats (27,8 grammes). Il est jaunâtre, taillé en rose et d’une mauvaise forme. Cependant on l’estime à 2 600 000 francs.

Le plus beau diamant d’Europe se trouve en France, et est connu sous le nom de régent. Il est taillé en brillant, d’une forme et d’une limpidité parfaites. Le duc d’Orléans, régent de Louis XV, le paya 2 250 000 francs. Il pesait alors 410 carats (82 grammes). La taille l’a réduit au poids de 156 carats (27,5 grammes). On porte sa valeur actuelle à 5 000 000 de francs.

Tous les diamans remarquables viennent de l’Inde. Le plus gros qu’on ait trouvé au Brésil, et que possède le roi de Portugal, pèse au plus 120 carats (24 grammes). Il n’a pas été taillé, et présente encore aujourd’hui sa forme naturelle.

Après le diamant, les pierres les plus recherchées sont celles que nous avons indiquées plus haut comme résultant de la cristallisation de l’alumine. Long-temps regardées comme des espèces minérales distinctes, elles ont été réunies en une seule par M. Brongniart, qui, joignant ses propres recherches à celles de ses devanciers, reconnut pour toutes ces pierres une même composition et un même système cristallin. Toutes les gemmes distinguées par l’épithète d’orientales, le rubis, le saphir, l’émeraude, la topaze, l’améthyste, l’hyacinthe, le péridot, ne sont que des variétés du corindon télésie. Quelques atomes d’oxides métalliques, quelques accidens de cristallisation, suffisent pour établir entre toutes ces pierres précieuses ces différences extérieures qui n’altèrent en rien leur nature fondamentale.

Le rubis oriental paraît ne pas avoir été connu des Romains. Leur escarboucle (carbunculus), dont le rouge éclatant simulait l’éclat d’un petit charbon, était, selon toute apparence, une belle variété de notre grenat. Aujourd’hui le rubis est la pierre la plus estimée et la plus chère. Les princes d’Orient surtout le recherchent avec une véritable passion. Une de ces pierres, que sa grosseur et son éclat ont fait nommer montagne de lumière, a souvent changé de propriétaire à la suite des crimes qu’inspirait le désir de posséder ce trésor unique dans le monde. En Europe, la valeur des rubis, quand la pierre est sans défaut, dépasse celle du diamant. Lors de la vente des pierres fines qui composaient la célèbre collection du marquis de Drée, un très beau diamant de 2 carats fut payé 800 francs. Un rubis exactement du même poids fut payé 1 000 francs. Dans la même vente, le prix d’un rubis très beau, de 2 et demi carats, s’éleva jusqu’à 14 000 francs. Enfin, on s’accorde à regarder un rubis oriental de 7 à 8 carats sans défauts, et d’une belle teinte de feu, comme une