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importante question, que de reproduire les instructions que lord Glenelg adressait aux gouverneurs des colonies anglaises sur la même matière. « Là où il y aura assez de terrain pour donner à toute la population une subsistance abondante en échange d’un léger travail, cette population ne sera probablement pas suffisamment excitée à s’imposer un travail pénible et régulier. Pour prévenir ceci, il sera nécessaire de pourvoir à ce que personne ne prenne possession des terres de la couronne sans un titre en règle, et de ne les allouer qu’à un prix qui les mette hors de la portée des individus dépourvus de capital. Les règlemens, à ce sujet, peuvent varier selon les circonstances locales. Il semble qu’un pays est dans la condition la plus prospère, lorsqu’il y a sur le marché autant de travail qu’il peut en être profitablement employé. Dans les pays nouveaux, où la propriété de tout le sol inoccupé appartient à la couronne, et où les nouveaux colons affluent graduellement, il est possible, en fixant le prix des terres à un taux assez élevé pour les placer hors de l’atteinte de la classe la plus pauvre, de conserver le travail en abondance sur le marché. Cette précaution, en assurant l’abondance du travail en même temps qu’elle élève la valeur de la terre, fait qu’il est plus profitable de bien cultiver la terre déjà bien cultivée, que d’en acheter de nouvelles. D’après ce système, le territoire cultivé, ne s’étendant qu’avec la population, est toujours en proportion des besoins de la communauté tout entière ; la société reste alors ouverte à toutes les influences civilisatrices ; elle reste sous le contrôle direct du gouvernement, animée de l’activité qu’inspire la communauté de besoins et de la force que donne la division du travail ; elle est moralement, politiquement, économiquement, dans un état plus sain que si elle était abandonnée à son cours naturel. Il est une règle générale que, d’après ces idées, il est nécessaire de mettre en vigueur sur-le-champ : c’est qu’à l’avenir il ne soit disposé des terres de la couronne qu’aux enchères publiques, un prix minimum étant fixé, et en faveur du plus offrant. Dix pour cent du prix de la vente devront être payés comptant, et le surplus à une époque rapprochée, le tout antérieurement à la mise en possession. »

Rien n’est plus incertain que notre législation sur le domaine de l’état dans nos colonies ; on peut dire qu’à cet égard tout est à créer. Ainsi, depuis 1830, on a vu des concessions de terres faites tantôt par arrêté du gouverneur en conseil, tantôt par arrêté du gouverneur après délibération du conseil colonial. Ce n’est qu’à partir de 1845 que le gouvernement, voulant, à l’occasion des habitations domaniales, rappeler les administrations locales à l’observation des véritables principes, a déclaré nulles et sans valeur les aliénations qui n’avaient pas la sanction législative ; mais cette nouvelle doctrine, qui attaquait des droits acquis, a soulevé une vive opposition et donné lieu à des