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commettre des fautes de détail : mais ce dont je suis profondément convaincu, c’est que dans sa marche générale elle n’a été ni désastreuse, ni malhabile, que la France, sous ses auspices, s’est élevée à un degré de prospérité dont jamais elle n’avait approché jusque-là, et que ces immenses résultats ne se seraient certainement pas produits si une direction contraire eût été adoptée, si un autre esprit eût présidé au gouvernement de la fortune publique. Ma conviction est si bien faite à cet égard, que, si je suivais mon penchant, je ne traiterais qu’en pitié ces accusations entassées dans les rapports du 9 mars et du 8 mai, et cette soi-disant banqueroute dont la France, à son insu, aurait été, avant février, incessamment menacée ! Mais je le reconnais, il faut, dans un tel sujet, traiter tout sérieusement, tout, même les chimères. Nous chercherons donc avec scrupule si ce danger dont on se vante de nous avoir sauvés a eu jamais une ombre d’existence ; puis nous constaterons, sur les documens officiels publiés par la république elle-même, quelle était en réalité la situation financière de l’ancien gouvernement, et si les ressources dont il disposait, comparées à ses charges, pouvaient de bonne foi inspirer la moindre appréhension. Il est vrai qu’en passant dans d’autres mains, les ressources se sont amoindries tout à coup, et les charges au contraire sont allées croissant chaque jour ; mais franchement à qui la faute ? Est-ce à la monarchie par hasard ? Est-ce elle qui a pris les mesures et prêché les doctrines dont on récolte aujourd’hui les désastreux effets ? Nous ne craignons pas que le bon sens public s’y méprenne, mais il n’en faut pas moins le mettre sur ses gardes. Que les faits et les chiffres soient nettement rectifiés, la vérité bien établie, que tout le monde puisse apprécier clairement ce qui dans nos difficultés financières provient de l’ancien gouvernement, ce qui est du fait de ses successeurs : c’est tout ce que nous demandons ; nous aurons atteint notre but : chacun sera jugé selon ses œuvres.

Pour ne pas entremêler les questions de détail qui vont se présenter en grand nombre, pour procéder avec un peu d’ordre et de clarté, nous nous attacherons successivement aux points suivans :

D’abord nous examinerons quelle était au 24 février la situation du trésor. Était-elle alarmante, comme on le prétend aujourd’hui ? Le service de l’année courante pouvait-il être compromis ?

En second lieu, indépendamment de toute chance immédiate de danger, existait-il des sujets de crainte pour un avenir plus ou moins prochain ? L’état avait-il porté trop haut ses dépenses ? Avait-il au contraire des moyens assurés d’y pourvoir ? En un mot, quelle était la situation des budgets tant ordinaires qu’extraordinaires, ou, en d’autres termes, quel était l’état de l’impôt et du crédit ?

Enfin, nous plaçant à un point de vue plus général, et jetant un coup d’œil en arrière, nous embrasserons dans son ensemble toute