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comme à un fantôme impossible ; mais, je dois le dire, ce m’est aussi une vraie douleur que d’avoir assisté à la chute de nos finances, d’avoir vu tant de progrès si brusquement interrompus, de ne plus suivre dans sa marche cette grande opération mal comprise de quelques-uns, calomniée par quelques autres, et dont le dénoûment aurait été un si grand bienfait général, une si éclatante justification !

Au lieu de ces accroissemens graduels du revenu public auxquels nous nous plaisions à assister tous les trois mois dans les colonnes du Moniteur, nous avons vu, en un seul jour, ce même revenu rétrograder de dix années ! nous avons vu les dépenses s’accroître plus rapidement encore que diminuer les recettes ! nous avons vu, pour la première fois depuis dix-sept ans (depuis trente, soyons juste), les percepteurs frapper à nos portes en vertu de nouveaux impôts. Nous avons vu l’emprunt, 400 millions d’emprunt ! consacré non plus à ouvrir au pays de nouvelles sources de prospérité, mais à porter le poids de ses charges ordinaires ! Détournons les yeux de ce spectacle ; ce n’est pas pour en étaler les misères que nous avons pris la plume, ce n’est pas non plus pour éveiller de tardifs et stériles regrets : c’est uniquement 1pour rendre hommage à la vérité. Qu’on nous permette seulement d’adresser, en terminant, cette simple réflexion à M. le ministre des finances : S’il n’y avait que les embarras financiers qui renversassent les gouvernemens, la monarchie serait encore debout ; si des finances embarrassées suffisaient pour les détruire, la république courrait des périls dont nous ne supposons pas qu’elle soit menacée.


L. VITET.