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par les accusés et par les accusateurs, et c’est vous qui nous défiez de le chercher ! Nous voyons que les rapports entre le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel sont mal définis, mal établis, mal assis ; nous craignons de les briser en y touchant trop rudement, et nous n’y touchons qu’avec réserve et circonspection ; nous faisons une simple remontrance au lieu d’une protestation, parce que nous voulons éviter toute atteinte à la prérogative de la couronne, et quand nous, les représentans ou du moins les organes les plus directs du pouvoir spirituel, nous cherchons à éviter tout conflit, c’est vous, les représentans ; du pouvoir temporel, qui raillez notre timidité et nous provoquez à la lutte ! C’est bien ; peut-être pour cette fois serons-nous vaincus, mais vous n’y gagnerez rien ; peut-être serons-nous forcés de rendre nos armes, mais nous en chercherons d’autres, et la leçon nous servira pour l’avenir. »

Lord John Russell raisonnait encore de la manière la plus triomphante quand il récusait la juridiction de l’université d’Oxford, quand il disait que, s’il reconnaissait un décret émané de l’université comme un ban perpétuel d’exclusion, il abdiquerait la prérogative de la couronne et la transmettrait à une corporation. Rien n’est plus juste. Il y avait encore certaines illusions à l’endroit des universités anglaises ; on leur attribuait encore un certain degré d’autorité en matière théologique ; lord John Russell leur a porté le dernier coup. N’étant pas de la communion anglicane, nous ne sommes pas tenu de compatir à la triste position dans laquelle le premier ministre de la Grande-Bretagne place son église ; au contraire. Nous laissons donc lord John avoir raison tout à son aise, et prouver irréfragablement qu’il n’y a dans l’église anglicane aucune autre autorité doctrinale, aucun autre tribunal spirituel que... la couronne, et son ministre responsable, pour le moment lord John Russell.

Or, c’est une église admirablement constitutionnelle et parlementaire que cette église anglaise, et elle est fort intéressante à étudier sous cet aspect. Ainsi, il y a pour l’Angleterre une religion d’état, qui est celle de la majorité ; cette religion se trouve être, en Irlande, celle de la minorité, ce qui n’empêche pas qu’elle y soit aussi la religion d’état. Ce n’est pas là qu’est le mal ; car, en principe, le fait de la majorité ou de la minorité ne saurait rien changer à la vérité d’une doctrine. L’Angleterre peut donc très logiquement soutenir la même religion, la même vérité, au-delà comme en-deçà de la mer d’Irlande ; mais passez son autre frontière et allez en Écosse : vous y trouvez une autre religion d’état, une autre vérité, également soutenue par la loi, par la constitution. En Angleterre et en Irlande, la vérité c’est l’anglicanisme ; en Écosse, c’est le presbytérianisme.

Il y a mieux. Le souverain, en Angleterre, étant le chef spirituel, la tête de l’église, head of the church, la couronne étant représentée par