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LE ROMAN


DE MOEURS IRLANDAIS


PAR LEVER.




The Knighti of Gwynne, by Lever. — Harry Lorrequer, by the same. — The O’Donoghue, by the same.




La crise irlandaise de 1847, qui n’était pas seulement une famine, mais une révolte, a préludé à nos catastrophes présentes et aux terribles aventures que les peuples européens courent aujourd’hui. L’Irlande, placée à l’avant-garde de nos misères, a poussé le cri de guerre des sauvages avant la bataille. Elle souffrait à peu près des mêmes maux que nous : beaucoup d’iniquités sociales ; une population sans principes et sans pain ; le matérialisme sensuel distribuant une civilisation inégale et une éducation fausse ; la barbarie renaissant hideuse du sein des corruptions ; une mauvaise répartition du travail et du capital, surtout de grands vices moraux, surexcités par une année de disette et les affres de la faim.

Nous sommes aujourd’hui trop occupés de nous-mêmes pour penser beaucoup à l’Irlande, dont la situation néanmoins contient de sévères et utiles enseignemens. Depuis des siècles, ce pays étrange et prédestiné était revenu, en sens contraire du mouvement européen, à l’état de barbarie vers lequel d’autres races se précipitent avec une ferveur insensée. Condamnée à l’assimilation, l’Irlande ne veut pas la subir ; l’indépendance qu’elle cherche est sa ruine. Elle organise sa destruction par sa fierté, et sa fierté s’accroît de sa misère. Comblez le détroit ou détruisez ces vices : tout changera ; mais rien n’a changé encore. L’Irlande,