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« Bien que la dépêche de M. de Metternich, dans sa rédaction vague et confuse, et au milieu des éloges qui y sont prodigués à l’habileté et à l’énergie du gouvernement du roi, n’ait pas, à beaucoup près, le caractère hostile et tranché qu’on pourrait lui supposer d’après le seul énoncé des argumens et des conclusions dont elle se compose, je n’ai pas cru pouvoir me dispenser de les réfuter avec force.

« J’ai répondu à M. de Hügel que, si je ne devais voir dans le document qu’il venait de me lire qu’une profession de foi plus ou moins contestable, je croirais superflu de la discuter, mais que, comme cette communication était sans doute autre chose qu’une manifestation de principes, j’étais amené à chercher quel pourrait en être le but.

« Aurait-on voulu, ai-je dit, insinuer que nous favorisons la propagande révolutionnaire ? Je ne le pense pas.

« Si j’avais à cet égard la moindre incertitude, je repousserais par le démenti le plus formel l’apparence d’une imputation dans laquelle le gouvernement du roi verrait une injure gratuite qu’il est décidé à ne pas tolérer. Vous apprendrez bientôt que notre envoyé auprès de la cour de Stockholm a, conformément aux ordres que je lui ai transmis, quitté cette capitale sans prendre congé du roi Charles-Jean, parce que ce prince avait cru pouvoir lui exprimer, sur la politique du gouvernement du roi, des soupçons analogues à ceux auxquels je fais allusion.

« Penserait-on seulement que, sans favoriser l’action des propagandistes réfugiés parmi nous, nous la laissons s’exercer trop librement ? Ce que je puis vous dire, c’est que nous avons fait pour la réprimer tout ce que nous permettent les lois qui nous régissent. Nous ne pouvons, nous ne voulons pas aller au-delà.

« Quant à l’espèce d’intimidation que semble renfermer la fin de cette lettre de M. de Metternich, voici ma réponse : Il est des pays où, comme nous l’avons déclaré pour la Belgique, pour la Suisse, pour le Piémont, la France ne souffrirait à aucun prix une intervention des forces étrangères. Il en est d’autres à l’égard desquels, sans approuver cette intervention, elle peut ne pas s’y opposer, dans une circonstance donnée, d’une manière aussi absolue. C’est ce qu’on a pu voir lorsque l’armée autrichienne est entrée en Romagne. Ce qu’il faut en conclure, c’est que, chaque fois qu’une puissance étrangère occupera le territoire d’un autre état indépendant, nous nous croirons en droit de suivre la ligne de conduite que nos intérêts exigeront, c’est que ce sont là de ces occasions où, les règles du droit commun n’étant plus applicables, chacun agit à ses risques et périls.

« M. de Hügel s’est récrié contre l’interprétation que je semblais donner à la dépêche de M. de Metternich ; il m’en a relu plusieurs passages pour me convaincre qu’elle était conçue dans un sens bienveillant. Je me suis borné à lui répliquer que mes réponses n’étant basées que sur les suppositions que j’avais cru pouvoir rattacher à la dépêche autrichienne, elles tombaient d’elles-mêmes, si ces suppositions n’étaient pas fondées.

« Le lendemain, M. le ministre de Prusse et M. l’ambassadeur de Russie sont venus me faire des communications conformes, au fond, à celles que j’avais reçues de M. Hügel, mais bien différentes dans la forme.

« Une très longue dissertation sur la propagande, les protestations les plus