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varièrent, la conduite et les procédés furent les mêmes, tant il est vrai qu’il n’y a rien de moins changeant que les caractères, rien de si persistant et de si vivace que les passions des hommes.

Le traité du 22 avril 1834, devenu célèbre sous le nom de traité de la quadruple alliance, causa, on s’en souvient, une sensation générale. Jusqu’alors, la France et l’Angleterre avaient plus d’une fois concerté entre elles leur langage et leur action, elles avaient ainsi pesé d’un double poids dans la balance équilibrée des grandes puissances continentales ; cependant, ni au sujet des affaires de Belgique, si longuement débattues dans les conférences de Londres, ni à l’occasion des mouvemens de l’Italie septentrionale, qui avaient failli allumer la guerre, elles n’avaient jugé utile de confondre leur politique, encore moins de se lier l’une envers l’autre et toutes deux ensemble vis-à-vis de l’opinion publique par des stipulations solennelles. L’éclat inattendu de la nouvelle alliance devait faire supposer qu’outre le but avoué, c’est-à-dire l’assistance conditionnelle à prêter aux cours de Portugal et d’Espagne contre les tentatives contre-révolutionnaires de don Carlos et de don Miguel, la France et l’Angleterre poursuivaient quelque autre objet de plus grande portée. L’état de l’Europe à cette époque autorisait cette conjecture. Partout une lutte ouverte ou latente était engagée entre les idées libérales et les systèmes absolutistes, et une sourde agitation remuait l’esprit des populations. En de telles circonstances, l’alliance hautement proclamée entre quatre grands pays constitutionnels n’était-elle pas comme une sorte de défi jeté aux monarchies despotiques de l’Europe ? Les nations possédées du besoin des réformes politiques ne pouvaient-elles pas, à bon droit, la considérer comme une invitation à secouer les vieilles chaînes, à oser, elles aussi, ravir de vive force les précieux trésors de la liberté moderne, et à venir ensuite, affranchies et tranquilles, se grouper autour du drapeau des puissans protecteurs de leur indépendance ? En France et en Angleterre, les amis et les adversaires des deux cabinets, ceux qui approuvaient le traité du 22 avril, comme ceux qui en redoutaient les conséquences, adoptèrent unanimement cette interprétation, qui, même chez nous, a survécu à l’événement. Plus tard, des hommes considérables de notre parlement, recherchant historiquement à la tribune des deux chambres les causes qui avaient peu à peu refroidi l’Angleterre à notre égard, établirent avec beaucoup de raisonnemens et de détails que le cabinet whig s’était dégoûté de notre alliance, parce qu’il nous avait, dans la pratique, trouvés infidèles à la généreuse pensée déposée, en des temps meilleurs et d’un commun accord, par les deux gouvernemens, dans le traité de la quadruple alliance. Ces orateurs étaient tous de très bonne foi ; les journaux qui répétèrent leur thème, avec des variations infinies, ne l’étaient pas moins ; de l’autre côté du détroit, point de protestation, nulle