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négligea jamais rien pour se l’assurer et s’en prévaloir. Son bonheur fut de paraître, aux yeux de certaines gens, le mériter toujours. Des amis moins prévenus auraient facilement découvert les disparates d’une politique qui appuyait souvent en même temps les progressistes à Madrid et les modérés à Lisbonne. Il est vrai que les encouragemens étaient donnés aux ennemis exaltés de la reine Christine avec bruit et ostentation, et que les partisans modérés de la reine dona Maria recevaient des secours plus solides peut-être, mais moins divulgués. Lord Palmerston soutien des révolutionnaires espagnols recevait les éloges de l’opposition française aux dépens des ministres français ; de lord Palmerston inspirateur des contre-révolutionnaires portugais, combattant avec eux l’influence libérale de la France, il était à peine question. Le rapprochement entre les deux conduites était trop difficile à faire, et l’on se taisait. Les voiles jetés sur des contradictions si flagrantes étaient trop impénétrables ; personne n’essayait de les soulever. Loin de moi l’idée de blâmer le secrétaire d’état de sa majesté britannique de n’avoir suivi, en Espagne et en Portugal, aucun système préconçu ; il en avait bien le droit ; en outre, il ne faisait que se conformer aux traditions de la diplomatie anglaise. La diplomatie anglaise ne s’est jamais mise au service d’un principe exclusif, quel qu’il fût ; elle n’a jamais que par occasion, et dans les limites de son intérêt, secondé les causes généreuses. Si de nos jours lord Palmerston a su faire naître chez nous des illusions qu’il a ensuite exploitées à son profit, tant mieux pour son pays, tant pis pour le nôtre. Les procédés employés dans les affaires de la Péninsule étaient d’ailleurs si simples, qu’ils n’ont trompé que ceux qui ont bien voulu être trompés. S’agissait-il, pour lui, de servir son dessein favori de nous brouiller avec les autres puissances ? ce ministre, qui a depuis trouvé l’administration de M. Coletti trop peu avancée pour l’état des esprits en Grèce, et qui a tendu aux anarchistes de ce pays une main si complaisante, ne se fit pas scrupule de nous dénoncer à l’Europe indignée comme de dangereux promoteurs de propagande constitutionnelle à Athènes. Cet incident ne laissa pas de causer, dans la portion du monde diplomatique qui en fut alors informée, un peu plus que de l’étonnement. Nous nous garderons d’autant plus de nous expliquer sur la nature du procédé, qu’il a été qualifié plus sévèrement par le diplomate étranger à qui fut adressée cette singulière communication. C’était en 1835 ; le ministre des affaires étrangères du 11 octobre avait chargé la légation de France à Athènes de faire entendre de sages remontrances contre les désordres administratifs et le gaspillage financier qui furent en tout temps la plaie de la Grèce, et qui, après avoir absorbé les deux premières séries de l’emprunt, l’obligeaient à faire un prochain appel à la bonne volonté des puissances garantes. Si nos informations sont exactes, la teneur générale des remontrances avait