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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 octobre 1848.

L’état de siège est levé. La belle nouvelle en vérité ! Il y avait quelques honnêtes gens qui acceptaient avec douleur cette nécessité de salut public, il y avait d’autre part bon nombre de clubistes qui rongeaient sourdement leur frein et grondaient dans l’ombre sous la loi qui leur était imposée ; mais, pour la masse, pour ce qu’on appelle le public, hélas ! il y songeait bien ! Le peuple de France est amoureux de liberté, oui sans doute, si amoureux et si jaloux de son trésor, qu’après l’avoir reconquis sur les tyrans, comme on lui jure qu’il l’a fait, il lui faut tout de suite une armée d’occupation pour le garder envers et contre tous, et d’abord contre lui-même. La liberté ne va point en France à moins de cinquante mille hommes campés, l’arme au bras, dans Paris. Il n’y a que ce régime-là qui nous rassure, une fois qu’il est convenu que nous sommes émancipés. L’état de siége est levé ; n’ayez cependant trop de peur : on a fini les barraques, et les fusils n’y manquent pas.

Autre nouvelle : la constitution est achevée, la constitution de 1848, la dixième, la douzième, que sais-je ? dans la longue série de nos monotones révolutions. Voilà vraiment encore peu de chose ! Qui est-ce qui s’est si fort aperçu qu’on ne parlait plus de cela dans l’assemblée ? Où trouver un patriote naïf qui ait eu seulement l’idée de chanter le Te Deum, parce qu’on était encore une fois au bout de cette épreuve tant de fois déjà recommencée ? Un instant, on avait pu craindre que nos vieilles gloires, que nos vieilles et solides acquisitions de 89 ne fussent compromises par des intrigans ou des fous également dangereux ; le péril a disparu devant le courage et l’intelligence des grands citoyens qui n’a-