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Depuis que M. Rossi a accepté la difficile tâche de réformer et de faire fonctionner la machine si compliquée de l’administration romaine, Rome et les états pontificaux ne font plus parler d’eux. C’est le plus bel éloge qu’on en puisse faire. Les Romains ont, à ce qu’il parait, compris que leurs intérêts étaient en bonnes mains. Aussi se tiennent-ils parfaitement tranquilles, eux qui, il y a quelques mois à peine, en eussent remontré aux Livournais en fait de turbulence. Quant à Pie IX, il s’est déclaré fermement résolu à se maintenir dans les limites de la constitution ; et, moyennant cette assurance, le nouveau ministre a pu entreprendre et conduira, nous l’espérons, à bonne fin une tâche bien difficile, que son esprit délié, son savoir profond et son jugement sûr le rendaient peut-être seul propre à aborder en Italie.

En somme, l’Italie est à la paix, soit par sagesse, soit par lassitude, soit par impuissance. On n’a donc pas eu si grand tort de faire de la médiation, au lieu de se jeter à l’étourdie dans une guerre dont tout le poids et les hasards eussent été pour la France, sans aucun profit clairement indiqué. Seulement il importe à notre considération que les négociations produisent bientôt un résultat sensible. Les événemens de Vienne les ont suspendues au moment où l’on était encore à débattre le lieu où s’ouvriront les conférences ; elles vont reprendre. Il s’agit de regagner ce temps perdu. A Naples, il ne parait pas que nous ayons obtenu de plus rapides succès qu’en Lombardie ; les empêchemens sont, dans cette question, de plusieurs sortes. Nous les avons déjà signalés, et les plus considérables ne viennent pas, comme on le craignait d’abord, du côté des Siciliens. Ceux-ci ont fini par comprendre que les projets désespérés qu’ils avaient annoncés d’abord ne pouvaient que les conduire à une ruine inévitable, à un asservissement complet. Le gouvernement de Palerme a prêté l’oreille aux conseils de ses amis les plus désintéressés, et il a eu le courage de braver l’impopularité pour faire entendre la vérité à la nation. Le parlement a autorisé l’amiral Ruggiero Settimo à traiter avec Naples ; c’est une concession immense de la part de gens qui naguère juraient de s’ensevelir sous les décombres de leurs villes. De son côté, le roi Ferdinand, s’il n’accepte qu’à contre-cœur l’arbitrage des deux puissances médiatrices, n’a plus les mêmes raisons de résister et de se plaindre de l’atteinte portée aux droits de sa couronne, puisque ces droits ne sont plus contestés par les Siciliens, et que l’on prend pour base du raccommodement la constitution de 1812. C’est donc ailleurs qu’il faut chercher la vraie cause des lenteurs apportées dans le règlement définitif de l’affaire de Sicile. S’il est quelqu’un qui ait intérêt à ce que rien ne soit définitivement réglé, ce n’est pas nous apparemment qui, par humanité pure, faisons tenir la mer à notre escadre sur des côtes inhospitalières pendant la mauvaise saison, et le ministre anglais, M. Temple, revenu dernièrement à son poste de Naples, ne serait peut-être pas très embarrassé de signaler le véritable et secret auteur des difficultés qui semblent renaître sans cesse sous les pas des négociateurs.


Tandis que l’Europe s’élance avec une fiévreuse impatience vers des voies inconnues, l’Orient est le théâtre d’événemens qui ont aussi leur gravité. En Perse, le jeune fils de Mahommed-Shâh succède paisiblement à son père sous le titre de Nusser-Ood-Dîn-Shâh. C’est presque une singularité, en Perse, qu’un avénement aussi pacifique. On attribue ce résultat à l’intervention de M. Stevens, consul de sa majesté britannique à Tabriz. M. Stevens serait parvenu à négo-