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la guerre et des négociations, les rôles quelquefois intervertis, et la Prusse en désaccord apparent avec la nouvelle Allemagne, soit que le roi subisse, par impuissance, les caprices de l’autorité fédérale, soit qu’il cherche à rejeter sur elle, par calcul, la responsabilité d’une politique injuste.

Les Danois n’en porteront pas moins la peine de leur fermeté, et les voilà d’un même coup, et par une funeste complication d’événemens, en présence d’une insurrection à réprimer et d’une guerre étrangère à soutenir. Un territoire qui forme à peu près le tiers de la monarchie menace hautement de s’en détacher, et fournit sept mille hommes armés comme troupes régulières et corps francs à l’appui de cette menace. Un grand pays, l’Allemagne, intervient avec enthousiasme pour seconder la révolte avec vingt mille hommes de troupes régulières susceptibles de s’accroître à volonté. Le Danemark est un état maritime très puissant par rapport à son étendue, mais son armée est peu nombreuse, et au moment où ces événemens éclatent sur lui comme la foudre, il échappe à peine à une administration sans prévoyance, qui n’a rien préparé pour la lutte. Il est capable de mettre sur pied, en déployant toutes ses ressources, environ vingt-cinq mille hommes ; mais cinq mille au plus peuvent entrer immédiatement en campagne. Par bonheur, l’administration nouvelle, forte de la confiance de la nation et animée d’un patriotisme résolu, se multiplie en face du danger. Elle lance toutes ses forces disponibles sur le Schleswig, et reprend en quelques jours les villes de Flensbourg et de Schleswig, après avoir mis en complète déroute l’armée insurrectionnelle. Le Danemark combattait avec l’enthousiasme particulier aux guerres de principes, et il eut bientôt étouffé la révolte ; mais alors il se trouva en face de l’armée prussienne, qui n’attendait plus que l’occasion de croiser l’épée.

Jusqu’au moment où le Schleswig fut envahi, le Danemark hésita à faire usage des moyens de représailles dont il eût pu frapper la Prusse à l’aide de sa marine ; il se contenta d’ailleurs, par la suite, d’un blocus peu sévère et de la saisie de quelques vaisseaux. Il ne songea point à concéder de lettres de marque ni à attaquer les villes maritimes de l’ennemi, mesures autorisées par l’usage et triplement légitimes contre un adversaire puissant dont la conduite n’est justifiée par aucun droit, et qui entrait en campagne sans l’antique et respectable formalité de la déclaration de guerre. Avant d’en venir aux mains, on eut un moment l’espoir, au moins en Danemark, que la question se trancherait par des négociations. Les plénipotentiaires des parties belligérantes devaient s’assembler à Hambourg le lundi de Pâques (24 avril). Le général en chef danois, Hedemann, avait, par suite de cette espérance, reçu l’ordre formel d’éviter tout combat. Il avait ses positions près de la ville de Schleswig, et se tenait, en conséquence de cet ordre, dans l’expectative