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CHARLES LAMB


SA VIE INTIME ET LITTÉRAIRE.




Final Memorials of Charles Lamb, by Th. Talfourd. — London, Edward Moson.




I

Quatre personnes sont réunies dans un triste salon dont l’ameublement usé reluit, aux derniers rayons du jour, de cette propreté grise et froide qui est la morne élégance de la pauvreté. Auprès de la cheminée, deux vieilles femmes, dont l’une est clouée à sa chaise longue par la paralysie, s’entretiennent des affaires du ménage. Un vieillard assis devant une table bat d’un mouvement machinal un jeu de cartes et joue avec lui-même un fantastique piquet dont sa main droite et sa main gauche sont les partners. Vis-à-vis du pauvre joueur, une jeune femme travaille avec une activité fébrile à un ouvrage d’aiguille, parfois elle relève avec impatience sa tête fatiguée, et un brusque sentiment d’irritation allume ses yeux ; mais son regard reprend bientôt l’expression profonde, la résignation éteinte et timide que les angoisses de la gêne donnent de bonne heure aux natures méditatives et souffrantes. Le vieillard en enfance est, son père, la paralytique est sa mère, l’autre vieille dame est une tante. De temps en temps, au milieu d’un silence, la douleur arrache un gémissement à la mère, et la fille court à elle