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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 janvier 1849.

Nous avons vraiment peu de chose à raconter aujourd’hui, tout simplement une conspiration parlementaire, comme il s’en faisait dans le bon temps où l’on avait l’esprit à cela faute de soucis plus graves. Il parait que la situation intérieure est très commode, que nos finances présentent l’aspect le plus rassurant, que toutes les classes de la population ne demandent qu’à se laisser conduire où l’on veut, que l’Europe prend nos conseils et nous communique les siens avec une déférence bien propre à charmer des cœurs patriotes ; il paraît, pour tout dire, que le banc ministériel est un lit de roses, et que les portefeuilles de l’état n’ont jamais été plus légers aux bras qui les soutiennent, car voici de nouveau la guerre des portefeuilles. C’est pour le coup que nous retournons d’un grand train aux réminiscences monarchiques, et penser que ce sont des républicains purs qui compromettent ainsi leur austérité de la veille ! Ajoutons, en toute sincérité, qu’ils sont bien aidés par certains amis du lendemain.

Oui, l’an premier de la république reconquise n’est pas encore fini, le président sommeille encore dans les langes dont on l’a provisoirement enveloppé en suspendant son droit de veto, et déjà les grands intérêts de la patrie, qu’on a pourtant juré de sauver, disparaissent derrière l’intérêt égoïste des petites ambitions, qui ont aussi juré de se satisfaire. Déjà les intrigues de couloir et les pourparlers de bureaux se donnent rendez-vous au pied du fauteuil présidentiel ; déjà le pouvoir exécutif est circonvenu par l’espèce entreprenante de ces conseilleurs officieux qui se targuent de leur dévouement particulier à la personne suprême, Pour lui persuader qu’ils sont seuls de mise en qualité d’hommes d’état. Messieurs, de grace, attendez ; laissez-nous oublier que jusqu’ici tous les pouvoirs qui se sont perdus en France ont péri parce qu’ils n’avaient voulu que des dévouemens à leur service. Votre attachement, d’ailleurs, est de si fraîche date ! On conçoit, sans doute, que la passion qu’on a pour les gens soit d’autant plus vive qu’elle est plus subite ; nous croyons à toutes les révolutions du cœur ;