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Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/538

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et attire à lui les affaires par l’étendue des avances qu’il offre à quiconque lui remet des gages sûrs entre les mains. Ces sortes d’opérations ont les grains pour principal objet ; elles exigent la disponibilité de beaucoup de fonds, et ce genre de puissance est fort limité à Dunkerque ; mais les capitaux n’ont point de patrie ; ils se transportent partout où les appellent des emplois sûrs et lucratifs, et la création de l’entrepôt est le moyen de les faire pencher du côté de Dunkerque. La Belgique en a fait construire un auprès du bassin célèbre dont Napoléon a doté la ville d’Anvers ; cinq étages s’élèvent au-dessus d’un rez-de-chaussée sur cave, et la superficie disponible pour l’emmagasinement est de huit hectares. Les rails du chemin de fer pénètrent sous les voûtes de cette majestueuse construction, et les marchandises semblent se poser ou s’enlever d’elles-mêmes sur ces wagons. L’entrepôt rapporte à l’état 10 pour 100 du capital qui s’y est immobilisé, et, à mesure que les différens magasins s’en sont ouverts, le commerce a abandonné ses magasins particuliers, trouvant sur les mouvemens des marchandises une économie supérieure à la valeur des loyers qu’il perdait. L’entrepôt de Dunkerque serait placé dans des conditions encore meilleures. Tandis que celui d’Anvers est séparé du bassin par des quais de 40 mètres de largeur, ses murs s’élèveraient, comme ceux des grands magasins d’Amsterdam, de Bambourg et de New-York, droits sur les parois des bassins, et les frais du transbordement opéré par des machines s’y réduiraient à ceux d’un simple déplacement à bord. À ces conditions, une partie du commerce d’Anvers peut être attirée à Dunkerque ; les grains de la Baltique et même de la mer Noire en prendront le chemin ; ils y seront devancés par ceux des grands marchés de Bergues, d’Arras et des ports de Bretagne, et se porteront mieux que d’Anvers, suivant les besoins, vers Londres, Paris ou la Prusse rhénane. Les Hollandais et les Anversois ont été aussi bons juges des avantages de la position commerciale de Dunkerque que les Anglais des avantages de sa position militaire. Les alarmes que leur causa, en 1662, la concurrence qu’allait leur susciter la franchise accordée par Louis XIV au port de Dunkerque arrêtèrent, pendant plusieurs mois, la conclusion de la paix qui se négociait à La Haye. En 1700, M. de Barentin, intendant de Flandre, proposant divers moyens de ranimer le commerce maritime, annonçait que plusieurs maisons puissantes d’Anvers en attendaient l’adoption pour se transférer à Dunkerque. Bien des choses ont changé depuis le XVIIe siècle ; mais les rapports géographiques sont restés les mêmes, et la Flandre française a beaucoup plus gagné en facilité de communications que les Pays-Bas : rappeler ce qui s’est fait alors, n’est-ce pas montrer que, si nous savons tirer parti de notre port de Dunkerque, ce seront peut-être les capitaux d’Anvers et de la Hollande qui viendront compléter notre ouvrage ?

Quant au port d’Ostende, bien qu’il ne soit éloigné que de 45 kilomètres