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714 REVUE DES DEUX MONDES. hier, il n’y a plus moyen, je suis à bout. Tant mieux! mon parti est pris... Qu’il vienne ou non , ce sera certainement la même chose. N’importe! je vou- drais le voir. (Elle continue de marcher silencieusement pendant quelques minutes, puis elle s’approche d’une table, prend une feuille de papier et écrit.) «Ceci est mon tes- tament. » (Elle rit.) C’est bête, mais c’est comme cela. (Écrivant.) « Je donne aux pauvres tout mon bien, laissant à mes exécuteurs testamentaires le soin d’en tirer le meilleur parti possible dans cette intention. Je désire que l’on réserve seulement ce qu’il faudra pour continuer les pensions que je fais à quelques pa- rens de ma mère. On trouvera leurs noms dans le cahier bleu qui est sur mon bureau. » Est-il sur mon bureau? Oui. Bon. « Je mets sous ce pli deux souverains qui devront faire seuls les frais de mon enterrement. Qu’on s’arrange pour cela. « Je nomme pour mes exécuteurs testamentaires M. Maurice Erckler et M. le curé de Saint-Étienne. » (Elle signe, ferme le testament et y appose son cachet.) — Voilà l’histoire. — Vont-ils bavarder demain au théâtre ! UN DOMESTIQUE, Ouvrant la porte. Monsieur Maurice, madame. MADELEINE. Ah! — Qu’il entre. MADELEINE, MAURICE. MADELEINE, riant. Vrai, vous voilà? MAURICE. En personne. MADELEINE. C’est aimable. J’avoue que l’heure était indue, Savez-vousde quoi il retourne? MAURICE, riant. Cœur ! MADELEINE. Ah! non, par exemple! je n’ai pas de cette couleur-là dans mon jeu. — La vé- rité est qu’on m’a gâtée, et que je ne sais plus résister à un caprice. On m’a dit que vous étiez musicien, et j’ai eu envie de vous entendre... Voulez-vous vous mettre au piano? MAURICE. Très volontiers. MADELEINE. Eh bien ! non, ce n’est pas ça; et puisque ce n’est pas ça, je vous demande un peu ce que ça peut être? Asseyez- vous là. (Elle lui montre un fauteuil en face d’elle au coin du feu.) Répondez-moi. MAURICE. Vous m’embarrassez beaucoup. MADELEINE , éclatant de rire et laissant tomber sa main sur son genou. Je mettrais ma main au feu qu’il me croit amoureuse de lui !