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œuvres du XIIe siècle n’atteste un certain développement littéraire à la cour des comtes Thierry et Philippe d’Alsace. On cite parmi ces curieux documens la Vie de Jésus (Leven van Jesus), un voyage de saint Brandan (Reise des heiligen Braendaens), et un fragment d’un poème intitulé le Comte Rodolphe (Graef Rudolph). Au siècle suivant, un poète dont le nom s’est conservé, Willem Utenhove, ajoute plusieurs branches importantes au Roman du Renard, et donne à l’œuvre populaire une forme plus durable. Un autre poète, Maerlant, se présente aussi à nous comme l’un des écrivains les plus originaux de ce pays. Le Roman du Renard était déjà une protestation du bon sens un peu vulgaire contre la poésie chevaleresque ; Maerlant attaque expressément cette littérature, et lui oppose des poésies morales, des écrits sensés et graves, traductions et imitations de la Bible, des pères de l’église et des principaux scolastiques. C’est aussi à cette inspiration plus sage que brillante qu’il faut rapporter le Spiegel Historiael de Lodewyk van Velthem et les écrits de Henri Goethals. Il y avait donc une lutte entre le bon sens prosaïque des Pays-Bas et les brillans récits de Charlemagne et d’Arthur. N’oublions pas, en effet, que la langue française ou wallonne était cultivée avec soin dans le même pays. Plusieurs poètes de ce temps-là connaissaient également bien les deux idiomes, cela est visible dans les premières branches du Roman du Renard. Notre trouvère Chrétien de Troyes vivait en Flandre à la cour de Philippe d’Alsace, son protecteur, et vers la fin du XIIe siècle le comte Baudoin fit rédiger en français l’histoire de ses états. Il est probable que ce voisinage de nos trouvères nuisit aux développemens ultérieurs de la littérature flamande. Les érudits signalent des drames, des mystères populaires, colportés de ville en ville au XIVe et au XVe siècle ou représentés dans les chambres de rhétorique : on cite aussi la Coutume d’Anvers, écrite en 1500, les Gestes de Brabant, rédigés par Jean de Clère ; mais il ne paraît pas que la littérature flamande, après avoir brillé dans les commencemens du moyen-âge, ait long-temps et sérieusement survécu à cette époque. Au contraire, c’est le moment où la littérature hollandaise, plus tardive que sa sœur des Flandres, se régularise peu à peu, et entre dans une période heureuse. Les chambres de rhétorique, espèces d’académies qui se proposaient le développement de la littérature nationale, appartenaient à la fois à la Hollande et à la Flandre ; il semble cependant qu’elles aient eu plus d’importance dans le nord des Pays-Bas, surtout vers les derniers temps du moyen-âge. Enfin, après les déchiremens du XVIe siècle, après que l’influence française et la renaissance de l’antiquité eurent long-temps arrêté cette littérature où la sève primitive n’abondait guère, quelques écrivains d’élite au XVIIe siècle, Hooft, Vondel et Jacob Kats, constituent la langue et la poésie hollandaises. De-