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L’ordonnance de 1845 avait pour principe d’établir une forte centralisation à Alger, en y installant pour la justice, les finances, la colonisation et les travaux publics, quatre directions générales dont l’action devait s’étendre sur l’Algérie entière. On reprocha à ce régime de compliquer et de ralentir les affaires ; un vote de la chambre des députés, émis sur le rapport de M. de Tocqueville, provoqua une nouvelle transformation. L’ordonnance du 1er septembre 1847 accéléra les services administratifs en les divisant et en les localisant de manière à ce que chaque province eût son centre d’action. Enfin, une ordonnance qui date de trois mois (19 décembre 4848) a perfectionné ce mécanisme en étendant le régime civil aux territoires mixtes qui sont supprimés, en attribuant aux zones européennes le titre de départemens français avec l’administration départementale de la métropole.

L’assimilation, un de ces mots vagues dont les peuples se servent pour traduire un besoin, une souffrance qu’ils ne savent pas définir, l’assimilation complète de la colonie naissante à la vieille patrie ayant été réclamée comme le plus puissant moyen de colonisation, on a transporté à grands frais en Afrique des ressorts sociaux qui souvent y manœuvrent dans le vide. Des sacrifices ont été faits pour proportionner le développement du culte à celui de la population. Trente-huit églises ou chapelles ont été construites. Un épiscopat, deux séminaires, un clergé catholique d’une soixantaine de prêtres, plusieurs consistoires protestans, des synagogues et jusqu’à des mosquées, sont subventionnés. Tous les habitans de l’Algérie, sans distinction de nationalité, de religion, de classe, d’âge ou de sexe, peuvent participer gratuitement au bienfait de l’éducation européenne. Indépendamment du collège d’Alger, des écoles et des salles d’asile ouvertes dans toutes les villes, il a fallu, par des cours publics de diverses natures, provoquer le contact intellectuel des deux races. L’organisation judiciaire repose sur les bases les plus larges ; le cadre de la magistrature algérienne comprend aujourd’hui, avec la cour royale d’Alger, cinq tribunaux civils de première instance, deux tribunaux de commerce, dix justices de paix, des juges spéciaux dans certaines localités, et autant de justices militaires que de commandans de place.

On a pris à tâche de provoquer, de régulariser les transactions sur tous les points qui sont devenus accessibles. Dès qu’un courant d’affaires a signalé une ville à l’attention des administrateurs, on s’est empressé d’y introduire les principales institutions du commerce européen Des chambres de commerce sont établies à Alger, Oran et Philippeville. Quatorze places du littoral ont obtenu successivement des entrepôts. Le problème des échanges se trouve compliqué des plus grandes difficultés, quand il s’agit d’établir une juste pondération d’intérêts entre une colonie à qui les entraves sont funestes et une métropole qui veut acquérir un champ d’exploitation au prix des sacrifices qui