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nacés chez eux, n’entendent pas se laisser rejeter du sein de l’Allemagne ; ils persistent à représenter leur pays particulier dans cette grande diète nationale, comme pour se rattacher davantage à la souche commune et s’y appuyer contre leurs ennemis intérieurs. On peut croire qu’ils sont loin d’être favorables à tous les systèmes exclusifs inventés par les doctrinaires prussiens, pour n’avoir qu’une Allemagne où l’on ne mettrait pas l’Autriche, afin que l’Allemagne appartînt plus sûrement à la Prusse.

Les députés autrichiens sont à Francfort au nombre de 121 ; la proposition de M. Welcker n’a été repoussée que par 31 voix ; 6 Autrichiens seulement se sont abstenus ; si les 115 autres avaient suivi leur exemple, il ne restait que 420 votans, et la proposition passait à 251 voix contre 169 ; elle n’avait plus contre elle que le fédéralisme républicain et les jalousies du séparatisme provincial. Dans une situation ainsi tendue et comme pour en aggraver encore la difficulté afin d’en précipiter la solution, M. de Gagern a cru devoir se retirer avec tous les membres de son cabinet. Il n’y avait là, en apparence, qu’un débat de constitution qui ne pouvait aboutir à une question de portefeuille ; mais ce débat entrait au plus vif dans les intérêts auxquels le ministère avait dévoué toute sa politique ; le résultat la renversait de fond en comble. Cette politique était à bout ; elle ne pouvait plus remplir les obligations matérielles qui lui étaient imposées par le rôle qu’elle ambitionnait. Comment être véritablement un empire d’Allemagne sans guerroyer en Danemark au nom de l’Empire ? et comment faire la guerre, quand la Prusse ne voulait pas s’y prêter ? et comment enfin y contraindre la Prusse sans l’investir elle-même de cette toute-puissance centrale dont il faudrait bien alors qu’elle acquittât les charges, puisqu’elle en porterait le titre ? L’échec de M. Welcker obligeait la politique de M. de Gagern à se déclarer en faillite : placé entre les délégués allemands du Schleswig, qui le priaient d’entamer la campagne, et les gouvernemens de Prusse et de Hanovre, qui se refusaient à ses injonctions, il ne savait plus probablement où donner de la tête, lorsque la démolition de tout le système d’impérialisme prussien, par le vote du 21 mars, lui a fourni un prétexte honorable de quitter le pouvoir.

Le dernier vote du 28, qui a remis les choses en l’état où les souhaitait M. Welcker, est-il une reconstruction définitive du plan de M. de Gagern, et peut-il l’autoriser à reprendre avec quelque chance le portefeuille qu’il a déposé ? Tout ce que nous avons à dire, c’est que c’est ici ou une vaine parade qui terminera une comédie politique infiniment trop prolongée, ou le commencement d’une des dissidences les plus profondes et les plus funestes pour la paix générale de l’Europe. Les impérialistes prussiens n’avaient pas perdu courage comme M. de Gagern. Le second débat sur la constitution allait s’ouvrir ; on devait, dans peu de jours, voter définitivement la grande charte nationale, voter l’article relatif au titre d’empereur, l’article relatif à l’hérédité de l’empire, voter enfin le nom même d’un élu impérial. M. Welcker avait espéré précipiter le dénoûment ; le cours naturel des discussions parlementaires ramenait maintenant l’occasion qu’il avait tâché de devancer. On pouvait, d’ici là peut-être, obliger les Autrichiens et leurs adhérens à s’abstenir : c’est en effet ce qui est arrivé au moment décisif. Le 27 mars, 267 voix contre 263 décrétèrent l’hérédité du titre impérial ; le lendemain, grace aux nombreuses abstentions, 290 voix ont suffi pour porter ce titre dans la maison de Brandebourg. Le vote a eu lieu