Soit ; il n’y a d’utile, il n’y a d’urgent, à cette heure, que de nous bien fortifier dans Orléans.
J’appellerai le régiment de lansquenets, les deux mille pistoliers du comte de Rhingrave ; je ferai descendre par la Loire nos vieilles bandes revenues de Piémont ; nous aurons nos quatre mille Suisses, les nouvelles gardes du roi ; d’Aumale nous amènera ses gens d’armes, Nevers ses trois mille lances, Nemours huit ou dix enseignes…
Assez, assez, je n’écris plus… À quoi bon tant de monde ? pourquoi tant de fracas ? Contentons-nous du nécessaire, et surtout pas de bruit, sans quoi le but est manqué ; nos oiseaux s’envoleront, Navarre et Condé ne viendront pas.
Eh bien ! s’ils ne viennent pas, nous irons les chercher.
Vous y voilà ! je vous voyais venir. Mais entendons-nous, s’il vous plaît. Aller les chercher, c’est la guerre.
Et les laisser venir, c’est… voyons un peu ?… c’est quelque chose qu’il ne faut pas nommer. Eh bien ! j’aime mieux me battre avec les gens que de les prendre au trébuchet.
LE CARDINAL DE LORRAINE.
Dites que vous voulez guerroyer ; c’est tout simple, à chacun son métier. Vous êtes de l’avis du prophète : Necesse est adveniant bella. Triste nécessité ! pauvre remède ! La guerre ne termine rien. Quand on s’est bien battu, bien égorgé, le vainqueur n’est guère moins épuisé que le vaincu ; on se repose, on reprend haleine, et tout est à recommencer. Moi je préfère, quand le ciel nous les offre, des moyens plus prompts et plus actifs, plus sûrs et moins coûteux. Que faut-il pour tout pacifier en ce royaume, pour guérir les plaies de la religion, pour affermir notre autorité ? Quelques hommes de moins, voilà tout, et en tête de ces hommes le roi des brouillons, cette peste de Condé. Eh bien ! je vous en prie, répondez à ma question : pourquoi Dieu a-t-il mis en nos mains ce papier merveilleux, preuve accablante, témoignage irrécusable qui tue son criminel comme un couteau tranchant ? Apparemment pour que nous nous en servions. Or, je soutiens que le vrai, le seul moyen de s’en servir, ce n’est pas une guerre, c’est un procès.