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REVUE DES DEUX MONDES.
LE CHANCELIER.

À mes ordres, monseigneur ? (Bas.) C’est moi qu’on pense mettre aux siens.

LE CARDINAL DE LORRAINE, bas au duc de Guise.

Venez, mon frère, le roi doit être avec sa mère ; il ne faut pas que cela dure trop long-temps. (Haut.) Bonjour, chancelier !

(Le chancelier s’incline, ils sortent.)



Scène XXVI.

LE CHANCELIER, seul.

Quelle violence ! quel mépris de tout conseil, de toute raison ! Pauvre royaume, par quelles gens te voilà conduit ! sous quelle justice allons-nous vivre !… Si l’arrêt leur déplaît, ils le briseront… Tout doit marcher à leur caprice, même l’instruction d’un procès ! — Ce Robertet !… mon surveillant !… C’est ce qu’il faudra voir ! Je lutterai pied à pied tant qu’ils me laisseront debout. (Il aperçoit la reine-mère qui s’avance à pas lents, d’un air très préoccupé.) La reine !… Quel coup ce doit être pour elle ! Que deviennent ses desseins et tout ce grand espoir en l’assemblée des états !…



Scène XXVII.

LA REINE-MÈRE, LE CHANCELIER.
LA REINE-MÈRE, sans voir le chancelier.

Ils me font fuir… Tant d’insolence en si peu de mots ! Ils veulent me rebuter, m’effrayer… Je crois vraiment qu’ils en viennent à bout. (Apercevant le chancelier.) Ah ! vous voilà, monsieur de L’Hospital ; vous aussi vous m’abandonnez donc !

LE CHANCELIER.

Moi, madame ?

LA REINE-MÈRE.

Avoir autorisé de votre nom l’iniquité qu’on fait faire à mon fils !

LE CHANCELIER.

Madame, on ne se gouverne pas comme on veut en compagnie de gens si audacieux et si puissans ! Je n’avais de choix qu’entre deux conduites : déposer les sceaux entre les mains du roi, ou signer le décret qu’il avait signé lui-même. Le premier parti n’était bon qu’à moi seul, il me donnait ma liberté. Empêchait-il l’arrestation du prince ? Hélas ! non. Ses ennemis n’en triomphaient pas moins et, de plus, ils avaient la joie de mon départ. Mieux valait donc garder un poste où, si Dieu le permet, je puis maintenir le procès qui se prépare dans les voies de justice et de modération.