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les partis. L’unité de l’Allemagne ! cette œuvre si chère, si désirée, si long-temps attendue, les notables venaient de la commencer enfin ! Avec quelle cordialité sincère on vota des remerciemens à la ville de Francfort, aux cinquante et un membres du comité d’Heidelberg, à la commission des sept, au président et aux vice-présidens des notables ! Des bravos répétés saluaient chacun de ces votes ; l’assemblée était fière de ses quatre journées, et le vénérable M. Mittermaier, dans un discours d’adieu où respirait sa confiance habituelle, exprima le bonheur naïf et les espérances enthousiastes qui enivraient les cœurs L’enthousiasme redoubla quand on vit les notables, marchant deux à deux, sortir solennellement de l’église Saint-Paul au milieu d’une population immense, au bruit prolongé des salves d’artillerie, au joyeux carillon de tous les clochers de la ville. La vieille cité de Francfort avait-elle jamais assisté, même pour le couronnement des empereurs, à une solennité plus radieuse ? Partout des tapisseries tendues et des bannières flottant aux fenêtres ; partout les couleurs de l’empire allemand, les couleurs noir, rouge et or, brillant sur des milliers de drapeaux. Le printemps ajoutait encore ses enchantemens gracieux aux juvéniles séductions de ces heures brûlantes. L’air était parfumé, la soirée était tiède, et des processions aux torches prolongèrent fort avant dans la nuit cette fête de l’enthousiasme et de l’espoir. Ne croyait-on pas, en effet, que l’unité de la patrie serait bientôt constituée sans peine d’après le plan idéal que traçaient les docteurs ? Comment ne pas se laisser gagner par cette confiance de tout un peuple ? Et quoi de plus beau que de tels songes, si l’heure du réveil ne devait pas sonner !


III

L’élection du comité des cinquante, commencée dans la séance du 3 avril, ne fut terminée que le soir. Le résultat parut satisfaisant. Le parti démagogique n’avait pu y introduire ses chefs ; M. Hecker et M. de Struve étaient exclus. D’autres membres de l’assemblée moins engagés avec les factions violentes, mais connus cependant pour la turbulence de leur esprit, M. Zitz (de Mayence), M. Schaffralh, M. le comte Reichenbach, M. d’Ester (de Cologne), n’avaient pas été plus heureux. Au contraire, des hommes éminens dit parti libéral, M. Alexandre de Soiron, M Heckscher, M. Lehne, M. Henri Simon, figuraient en première ligne sur la liste. Si M. Robert Blum y avait aussi sa place, c’est que l’éloquent député de Leipzig, je l’ai déjà prouvé, employait la plus habile diplomatie à se faire une position mixte entre les constitutionnels et les agitateurs. Dès le lendemain, 4 avril, à dix heures du matin, le comité des cinquante, succédant à l’assemblée des notables, se réunit dans la salle impériale du Roemer ; il choisit M. de Soit-on pour président, MM. Robert Blum et Abegg pour vice-présidens, et donna les