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intervenir. — Croyez-nous, répondaient les alliés des Magyars, l’Europe ne vous prendra au sérieux que si vous lui donnez des témoignages éclatans de votre force. Frappez l’Autriche au cœur, marchez sur Vienne. Faites de là un appel de conciliation aux Slaves, aux Valaques ; soulevez les principautés du Danube déjà tout émues ; puis, fournissez-nous les moyens d’entrer chez les Russes, la torche à la main, par la Gallicie ; nous porterons l’incendie sur leur propre territoire, et la Pologne, insurgée à son tour, rendra moins certaine l’intervention du czar en Hongrie.

Le général Georgey, qui était devenu tout-puissant dans l’armée après la prise de Bude, était bien moins encore que Kossuth disposé à écouter favorablement ce langage. En définitive, la Hongrie victorieuse était étrangement embarrassée de sa victoire. Par un acte de la diète de Debreczin (19 avril), elle avait proclamé son indépendance ; elle avait prononcé la déchéance de la maison de Habsbourg ; elle était, disait-elle, rentrée dans la famille des nations européennes. Elle eût voulu en rester là. Le général Georgey s’en tenait à cette pensée, pendant que M. Kossuth flottait dans l’incertitude de ses rêves poétiques. Les Polonais persistaient à dire qu’au point où l’on en était venu, l’immobilité était la mort. En effet, les Russes arrivaient peu à peu et sans encombre par les défilés de la Gallicie. Bientôt leurs bataillons devaient se trouver réunis à l’armée autrichienne reconstituée sur les rives de la Waag. En quelques semaines, la nation magyare allait être écrasée, et avec elle l’émigration polonaise.


HIPPOLYTE DESPREZ.