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nombre de matelots du commerce. Beaucoup de ports voient, hélas ! encore bien des matelots errer inoccupés sur leurs quais. Ces hommes ne viennent point se présenter d’eux-mêmes au service de l’état, qui leur serait avantageux : ils attendent un ordre, parce que ce service leur est antipathique, d’autant plus qu’il est forcé. Ils ont à ce sujet une sorte de répugnance qui fait que la plupart d’entre eux aiment mieux s’exposer aux plus dures privations que venir de plein gré au service ; mais la plupart d’entre eux l’avouent, c’est le plus souvent me affaire de respect humain.

Je voudrais m’arrêter, mais qu’il me soit permis de relever encore une inexactitude. On a attaqué, il fallait bien qu’il en eût sa part, le conseil d’amirauté ; chacun peut entendre à sa manière la composition et les attributions de ce conseil ; depuis long-temps, plusieurs projets ont été présentés sur ce sujet. En général, on prend pour point de départ l’amirauté anglaise, qu’on cite comme modèle à chaque instant ; on en voudrait une semblable, et chacun l’organise au gré de son imagination. L’amirauté anglaise se compose ordinairement d’un premier lord, toujours de l’ordre civil, de quatre officiers de marine, d’un sixième membre, fonctionnaire civil, et d’un premier et deuxième secrétaire. Il est extrêmement rare que le premier lord soit officier de marine. Ce n’est pas du tout un conseil permanent, comme on l’a assuré ; tous les membres de l’amirauté, jusqu’au premier secrétaire compris, suivent le sort du ministère dont ils font partie. L’amirauté n’est donc autre chose qu’un ministre en six ou set personnes. Or, il est un point qui n’est pas encore décidé et en ce nous penchons pour la négative : c’est celui de savoir si une administration est plus avantageusement dirigée par un conseil de plusieurs personnes que par un seul ministre. Les avis sont partagés à ce sujet en Angleterre, en sorte que de nombreuses objections ont été faites au système suivant lequel était administré le ministère de la marine anglaise. La principale s’appuie sur le défaut de responsabilité effective qui en résulte. C’est un argument puissant pour ceux qui ne croient pas que la responsabilité ministérielle soit un mythe. On ne manque pas alors de citer le système français comme préférable, ce sont surtout les marins qui articulent ces plaintes. Dans la nouvelle lettre au premier lord de l’amirauté que vient de publier l’amiral Napier, on lit : « Je demande la permission à votre seigneurie de l’engager à changer la composition du conseil d’amirauté. Comment, milord, est-il possible que les affaires de la marine puissent être bien dirigées par quatre officiers de marine ayant à leur tête un fonctionnaire civil qui n’entend rien, et à leur suite un autre fonctionnaire civil qui y entend moins que rien, travaillant dans des appartemens séparés et n’entendant pas parler les uns