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féminin. On raconte qu’il était l’amant de la comtesse de Carliste, favorite de la reine Henriette. Quelques jours avant son arrestation, il écrivait à son secrétaire en Irlande. : « Pour l’amour de Dieu, prenez soin de tout l’argent dû à milady Carlisle soit payé avant Noël, car je n’ai jamais rencontré en ma vie une amitié plus noble et plus intelligente. » Peu de temps après la mort de Strafford, la belle comtesse de Carlisle,

Une Vénus sortant d’une mer de noirceurs,


comme l’appelait alors un poète, était la maîtresse de Pym. Le nœud de la tragédie s’était peut-être serré dans le cœur de cette Hérodiade.


II

Le héros avait donc péri avant la guerre. Cependant, lorsque Charles Ier s’avançait vers Nottingham, à côté de lui chevauchait un jeune homme dont les conseils vigoureux raffermissaient déjà le roi, tiraillé par ses propres anxiétés et par les avis contradictoires de son entourage : c’était le palatin Rupert. Le jeune prince avait à peine vingt-trois ans, son visage, pourtant bronzé par la guerre, était encore imberbe ; mais ses mâles et chevaleresques allures annonçaient le soldat qui devait couvrir d’une gloire guerrière les malheurs de la cause royale.

Rupert était né pour être chef de partisans et capitaine aventurier. Il vint au monde dans le berceau ; pour ainsi dire, et au feu de la guerre de trente ans. Il était fils d’Élisabeth, sœur de Charles Ier, et de l’électeur palatin qui accepta follement la couronne de Bohême des mains des Bohémiens insurgés contre la maison d’Autriche. Il naquit à Prague peu de temps après le couronnement funeste de son père et de sa mère. La royauté de l’électeur ne dura guère plus que les fêtes de son sacre. La reine Élisabeth fut obligée de s’enfuir de Prague, pris par les impériaux. Une nourrice sauva Rupert. Il grandit avec les infortunes de sa maison et fut élevé en Hollande, où sa mère avait trouvé un refuge. Cette guerre de trente ans était alors l’école des principaux officiers écossais et anglais qui figurèrent plus tard dans les guerres civiles d’Angleterre. Rupert y fit ses premières armes à l’âge de quatorze ans ; à seize, il servit, sous le maréchal de Brézé, avec un autre apprenti-soldat, Turenne. Il accompagna ensuite en Angleterre son frère aîné, Charles-Maurice, devenu l’électeur titulaire. Rupert fut dès-lors très populaire à la cour. On voulut le marier. On lui destinait l’héritière de ce grand duc de Rohan, le dernier chef du parti calviniste en France. La négociation de ce mariage alla fort loin et dura jusqu’en 1643. Il y eut un moment où Mlle de Rohan, se considérant