Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/262

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme à Paris, il n’y eut plus que des chargés d’affaires et enfin des consuls seulement.

Le plan du duc de Choiseul était de dénoncer à la Porte, comme une infraction au traité de Karlowitz, l’entretien permanent d’une armée russe en Pologne, d’en faire demander le rappel à Catherine II, et, en blessant la fierté de cette princesse, d’amener une guerre dont la conséquence serait la ruine de la puissance russe, M. de Choiseul ne doutait pas de la prépondérance des forces de la Turquie sur celles de la Russie ; ce fut là son erreur radicale. Pour lui, la défaite de Catherine était le but ; la liberté de la Pologne n’était que le moyen. C’est dans le sens d’un mouvement simultané des Polonais et des Turcs qu’il écrivit à tous les agens de la diplomatie française et principalement à M. de Vergennes, ambassadeur de Louis XV près de la Porte ottomane. M. de Choiseul dut s’applaudir d’autant plus de la nouvelle secousse imprimée à la politique européenne, que les événemens intérieurs de la Pologne semblèrent d’abord justifier ses prévisions et favoriser ses projets.

Une confédération générale qu’il avait mise au nombre de ses instrumens les plus puissans éclata en Pologne très peu de temps après la diète qui avait rétabli les anciennes lois et fait admettre les dissidens au partage de tous les privilèges de la noblesse, sous la garantie de l’impératrice de Russie. Le 29 février 1768, quelques gentilshommes assez obscurs se confédérèrent dans une petite ville de Podolie nommée Bar. Un vieux szlachlych, du nom de Pulawsky, accompagné de ses quatre fils, leva l’étendard, et réunit autour de lui beaucoup de cette noblesse. L’insurrection était l’ouvrage de cette classe ; les magnats y adhérèrent Plus tard, et le peuple, selon l’usage en Pologne, laissa faire sans se mêler de rien. Cette insurrection était toute catholique, ainsi que le serment des confédérés en fait foi.

« Je jure devant Dieu, la sainte Trinité, la sainte Vierge et tous les saints patrons du royaume de Pologne, et vous, saint père de Rome, chef de l’église de Jésus-Christ, que je ne trahirai point le secret qui m’a été confié pour la conjuration et la défense de la religion catholique romaine ; que je ne découvrirai pas non plus les personnes, l’endroit et le rendez-vous de notre réunion concertée, devant qui que ce soit, même devant le plus intime ami, soit du beau sexe, soit des hommes, jusqu’au terme fixé ; que je n’abandonnerai, pas la religion catholique romaine, mais que je la défendrai de mon corps et de mon épée, au risque de ma vie, jusqu’à ce qu’elle soit entièrement fondée et rétablie dans ma patrie. Je m’engage, par ce serment, à ce qu’aucun confesseur ne me remettre ma transgression.

« Chacun sera obligé de défendre la religion catholique romaine au prix de sa vie. On ne fera aucune violence, soit aux catholiques, soit aux juifs, et on ne