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l’appréhender au corps par des gendarmes ! Un peu surpris, le pays s’est laissé faire ; il n’a pas tout-à-fait dit non. Il n’était pas bien sûr qu’il n’y eût pas du vrai dans les paroles de ces nouveaux docteurs. Il n’en est pas parfaitement assuré encore aujourd’hui ! Où puiserait-il cette assurance ? Instruit comme il l’a été, il faudrait qu’il eût le régime constitutionnel à l’état d’idée innée, et l’économie politique à l’état de science infuse.

Les sciences politiques et économiques marquent donc une énorme lacune dans l’instruction supérieure de France. Nouvelle preuve de cette étrange aberration d’esprit, qui fait que l’éducation va d’un côté et la société de l’autre, sans qu’il y ait de confluent pour ces deux lits parallèles. Ce n’est pas là pourtant, suivant nous, encore le plus regrettable défaut de notre instruction supérieure. Sur les cinq facultés qu’elle reconnaît, il en est deux au moins, si ce n’est trois, qui n’ont qu’une existence nominale.

Ne disons rien des facultés de théologie : d’honorables scrupules sur la légitimité de leur institution canonique, en les privant de la bienveillance du corps épiscopal, leur ont ôté, en plusieurs endroits, cette autorité sans laquelle la religion n’est qu’une parole sans efficacité. L’institution doit en être révisée tout entière, de concert, nous dit-on, avec le chef de l’église. Ce serait assez pour nous commander le silence, quand nous ne serions pas par nous-même heureux de l’observer sur une matière si épineuse.

Les faculté de droit et de médecine, principalement celles de Paris, sont suivies par une affluence considérable d’élèves : leurs auditoires sont pleins, et leurs grades ne manquent pas de compétiteurs. Les facultés des sciences sont déjà beaucoup moins recherchées. Les grades dont elles ont la collation étant pourtant nécessaires pour les élèves de médecine, cette circonstance leur assure encore un nombre assez raisonnable, sinon d’auditeurs de leurs cours, au moins de candidats à leurs examens.

Il en est autrement des facultés des lettres : malgré l’incontestable mérite de leurs professeurs, celles-ci sont presque désertes. D’élèves réguliers se faisant inscrire pour suivre les cours, passant par la filière des grades, elles en comptent un si faible nombre, qu’il serait risible d’en parler. Chaque année voit bien faire encore (toujours à Paris) quelques licenciés et quelques docteurs ès-lettres, mais la plupart parmi les élèves de l’école normale centrale de Paris, pépinière du corps enseignant, qui ont chez eux, et pour leur propre usage, toute une hiérarchie de maîtres de conférences et de répétiteurs, tout un cours d’études particulier, qui paraissent à peine, et pour faire honneur à quelques professeurs d’élite, sur les bancs de la faculté, et rendent hommage à une vieille tradition universitaire en se parant d’un